lundi 9 juin 2008

• L'idée d'un chemin n'aurait même pas lieu d'être - Lama Wally

L'idée d'un chemin n'aurait même pas lieu d'être

Lama Wally


La base
Tous les êtres recèlent la nature éveillée de l'esprit : ceci est la base. Cette nature de bouddha est pure conscience. Elle peut être décrite comme étant vide, vacuité, comme l'espace mais elle est néanmoins connaissante.
Elle constitue le fondement de chaque être et est, en essence, non duelle. Cependant, nous ne la reconnaissons pas comme telle. Cet esprit est recouvert par des voiles, des obscurcissements, qui induisent un fonctionnement dualiste entre un sujet et des objets extérieurs.
Nous considérons que nous sommes différents et séparés des autres. Plutôt que d'expérimenter la conscience primordiale fondamentalement pure, nous expérimentons la solidité d'un "soi", d'un "je", d'une personne, en un mot d'un ego. Tout ce que nous vivons, la manifestation de cette nature fondamentale, va alors confirmer l'expérience de l'ego. Du fait de ce dysfonctionnement, de cette séparation, un processus en trois mouvements se met en place: celui de l'attachement, de l'aversion et de l'indifférence.
S'attacher signifie s'approprier ce qui nous semble bénéfique pour nous-mêmes. Par la colère, l'aversion, nous rejetons au loin ce qui nous déplaît. L'un et l'autre de ces mouvements d'humeur engendrent la souffrance. D'autre part, nous restons sans réaction, indifférents à ce qui ne nous rapporte rien ou ne nous gène pas. La conscience présente, fondamentale et pure, est recouverte par les voiles de nos tendances et celles-ci s'élèvent à cause de l'identification et de l'attachement à nos pensées et à nos émotions.
Si nous ne reconnaissons pas la nature vide et transparente de la pensée, immédiatement nous en faisons une expérience solide, concrète. Dès l'instant où nous n'avons pas conscience de la dimension transparente et fluide des pensées, la confusion s'établit. Les habitudes d'attachement, d'aversion et d'indifférence n'ont pas simplement un effet immédiat, elles se traduisent en terme de karma, c'est-à-dire en actions qui mûriront beaucoup plus tard sous forme d'expériences.
Cela se traduit en terme de cycle, le cycle des existences, dans lequel différents états de confusion se succèdent. Ne reconnaissant pas notre nature fondamentale, recouverte et voilée, la question se pose de savoir ce que nous allons faire pour sortir de la souffrance. Cette interrogation fait naître l'idée de la nécessité d'un chemin à parcourir. Si nous reconnaissions simplement ce que nous sommes fondamentalement, l'idée d'un chemin n'aurait même pas lieu d'être.

Le chemin
Le sens du chemin est de dissiper les différents voiles afin de reconnaître notre nature fondamentale. (.../...) Il est nécessaire de percevoir quels sont les processus en jeu dans le fonctionnement de l'esprit. Pour cela il nous faut pratiquer chiné et lhaktong, la pacification de l'esprit et la vision pénétrante. Nous sommes débordés par toutes les pensées qui jaillissent constamment et nous ne sommes pas pleinement conscients des situations que nous vivons. Ces pratiques proposent une véritable investigation de l'esprit pour aboutir à une vision directe de sa nature. La première étape est la pacification de l'esprit, l'entraînement à l'attention consciente. Nous découvrons que les pensées ne sont pas des choses solides, matérielles ou concrètes; plus nous méditons, plus nous sommes conscients de leur transparence. Nous ressentons un sentiment de liberté car nous saisissons moins les pensées, nous sommes moins dépendants d'elles, nous les laissons plus aisément se dissiper.
L'étape suivante consiste à approfondir cette vision des pensées et à essayer de reconnaître leur véritable nature.
Par cette reconnaissance, l'illusion est complètement dissipée. C'est ainsi que nous découvrons notre liberté naturelle. Tant que nous serons trompés par les pensées, tant que nous les prendrons pour quelque chose de solide, de réellement existant, le corps et la parole vont agir en fonction de ces pensées comme des serviteurs. En découvrant leur nature fondamentale nous nous libérons, nous n'agissons plus sous leur impulsion et c'est la fin du cycle.

Le fruit
Le troisième aspect est le résultat, le fruit. Le fruit d'une telle pratique est la reconnaissance de l'état naturel de l'esprit, la conscience fondamentale. Il s'agit non seulement de la reconnaître mais aussi de s'établir en elle de manière définitive. Certains fruits de la pratique apparaissent dans la méditation mais ce sont des fruits relatifs qui se dissipent d'eux-mêmes.

Question : Comment pouvons-nous prendre conscience que nous sommes libres sachant que nous sommes gouvernés par nos tendances ?
Lama Wally : Les tendances sont en elles-mêmes une expression d'enfermement et d'ignorance. Durant la première étape du processus de la méditation, nous prenons seulement conscience que nous sommes animés par des tendances récurrentes. Progressivement, nous les laissons s'élever et se dissiper d'elles-mêmes sans en dépendre. C'est un soulagement de voir comment nous pouvons nous détacher de ces tendances et commencer à voir leur dimension transparente.

Question : Si nous observons nos tendances dans la méditation, il y a toujours un sujet et un objet, il y a toujours une dualité. Comment faire ?
Lama Wally : Dans les pratiques de chiné et de lhaktong, il suffit de se détendre de plus en plus. C'est essentiel, car plus nous sommes tendus, plus nous avons ce sentiment de solidité et plus ce sentiment de solidité se développe, plus la dualité est renforcée. Le processus consiste à se détendre dans cet état naturel de l'esprit et à lâcher prise sur ce qui se passe.

Question : Comment prendre conscience de nos tendances ?
Lama Wally : Plus nous sommes agités, plus nous sommes distraits et plus les tendances se renforcent. Il faut s'asseoir sur son coussin et s'entraîner le plus possible à la vigilance. Sur ce chemin, la patience est nécessaire. Chaque fois que nous nous rendons compte que nous sommes distraits, que nous sommes influencés par nos tendances, il suffit simplement de revenir à la vigilance, c'est en cela que consiste la pratique.
Fondamentalement il est suffisant de voir, de reconnaître la tendance et la façon dont nous nous sommes investis dans celle-ci. C'est un entraînement qu'il faudra reprendre encore et encore, que ce soit sur le coussin de méditation ou dans l'activité. C'est sur le coussin que nous développons d'abord l'habitude de l'attention consciente.

Conclusion
Pour conclure, nous pouvons pratiquer chiné durant une session de méditation pour nous donner la saveur de ce qu'est la pratique. Nous nous asseyons le plus confortablement possible, le dos complètement droit et le reste du corps complètement détendu. Nous suivons le mouvement de la respiration et nous respirons de façon très douce, très naturelle. Lorsque nous inspirons, l'esprit se détend, s'apaise, et lorsque nous expirons, nous lâchons prise, nous laissons les choses en l'état. Nous suivons le mouvement de la respiration : inspire, expire, lâcher prise.
Accomplissant cela, nous prenons conscience qu'il y a toutes sortes de mouvements dans l'esprit. Nous ne prêtons pas attention à ces mouvements, à ces pensées et les laissons simplement s'élever. Aucune pensée n'est plus importante qu'une autre. Ainsi, laissant s'élever les pensées sans les saisir, elles se dissipent et disparaissent d'elles-mêmes, il n'y a pas d'autre façon de faire. Nous ne bloquons pas les pensées, nous ne nous en débarrassons pas. Nous les laissons s'élever et nous lâchons prise. En suivant ces instructions, l'esprit va se pacifier progressivement.

Pour conclure la méditation, nous dédions l'activité bénéfique de la pratique, l'activité de la méditation mais aussi de l'écoute et de la réflexion à tous les êtres en faisant le souhait qu'ils puissent être connectés au Dharma et réaliser l'éveil.

Extraits choisis pour Éveil Impersonnel.
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