mardi 9 juin 2015

• Il n’y a personne pour être une personne - Suyin Lamour


La dissolution

Je sais maintenant ce qui devait mourir, être dissout. Non pas le personnage-moi, puisqu’il n’existe pas. Mais la croyance en l’existence de ce personnage.
L’individu est en réalité un repliement, une densification de conscience. La conscience se déplie, et c'est toujours de la conscience. C'est la même chose. Il n’y a pas de séparation entre l’ego et la conscience. L’ego est de la conscience qui se prend pour quelqu’un.
Lors de la première révélation, j'étais La conscience cosmique. C'était une forme d'identité. Je ne cessais de répéter, émerveillée : « Je Suis ! »
L’univers, que j’étais, était une entité intelligente. Un être infini, mais un être.
Là, le "je" n'a plus de consistance. Il n'y a pas quelqu'un ou quelque chose qui est, il y a seulement le fait d'être.
Et là, pas de coeur qui s'ouvre, pas d’état extatique.
Je m’étonne de ma neutralité.
Pas même la joie d'avoir trouvé, car personne n'a rien trouvé. Ni celle d’être libérée, car il n’y avait personne qui était en prison.
Tout ce qui pouvait me définir s’effondre.
La notion d’individualité se dissout, puis j’entends une petit voix inquiète en moi dire « pourtant j’existe bien, quand même ! » Je souris. Comme si pour exister, je devais me définir. Comme si ne plus être quelqu’un ou quelque chose, c’était ne plus être.
Je la rassure. Oui, il y a bien existence. Il y a bien le fait d’être. Il n’y a rien d’autre que cela.
La nécessité d’écrire est là.
Ces premiers mots jaillissent sur la feuille :

Il n’y a personne pour être une personne.
Il n’y a personne qui voit, il y a le fait de voir.
Il n’y a personne qui pense, il y a le fait de penser.
Il n’y a personne qui est, il y a le fait d’être.
Celui qui croit voir, penser, être, n’existe pas.
Est-ce qu’il y a quelqu’un qui perçoit tout cela ?
Non, il y a le fait de percevoir.
Est-ce qu’il y a une entité qui est une conscience ?
Non, il y a de la conscience.

Je pose le cahier et observe ce qui se vit en moi. L’énergie est surtout dans la tête. Des pensées en forme d’Eureka fusent toutes les secondes. C’est pour cela qu’il me faut écrire. Je ne peux les contenir.

La crainte de ne plus pouvoir dire "je" me traverse. J’écris, et en écrivant, le « je » survient tout naturellement. Mais ce mot ne sonne plus que comme un simple outil de communication, d’expression. Il a perdu son sens.

Le monde tel que je le perçois n'existe que pour ce personnage que la conscience joue à être. Ce personnage n'a aucune réalité objective, et donc aucun pouvoir réel.
Il ne possède rien ni ne décide rien.
Il n'y a rien qui appartienne à quelqu'un. "Mes" émotions, "mes" pensées, "mes" réactions, sont des phénomènes énergétiques qui se produisent dans le réceptacle que je suis, et auxquelles le mécanisme de mon psychisme donne une forme déterminée. Il se les approprie alors qu'il ne joue qu'un rôle de récepteur. Mais même quand je dis "mon psychisme", cela sonne faut. Il n'y a personne a qui appartienne ce psychisme ! Il est juste une manifestation de la vie.
Extrait publié avec l'aimable accord des Éditions Accarias-L'Originel

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Et une fois n'est pas coutume, j'ai l'immense joie de vous annoncer la nouvelle parution de mon tout premier livre, L'art et la pratique spirituelle du Reiki, qui vient d'être re-publié en format papier aux Éditions Grancher.
La mise en page a été particulièrement réussie. Le texte a été revu, corrigé et augmenté (notamment, l'aspect historique a été entièrement ré-écrit pour l'occasion).



lundi 8 juin 2015

• Atma Yoga - Patrick Vigneau


Préface
Eté 1981, j’ai 24 ans. Avec ma compagne, nous sommes en voyage en Inde. Nous commençons à faire des projets d’avenir : avoir un enfant, une maison, etc…
Je suis sur la plage, quand soudain, l’horreur. Tout s’écroule violemment : l’accident. En quelques instants, là, ma compagne se noie … Abomination, trou noir, fin du monde. Tout disparait. Le temps s’arrête dans la souffrance totale. Il n’y a plus que le néant.
Quatre jours plus tard, on me conduit près d’une dame indienne. Elle ne parle pas anglais, je demeure en silence près d’elle. En sa présence, la souffrance disparait. Mystère, il y a un grand calme en moi. Dès que je la quitte, la souffrance revient.
Alors le lendemain, je retourne auprès de cette dame: même sensation absolue de calme. Par un interprète je lui demande : « est-ce que je peux ressentir toujours cette paix ? »
En me regardant fixement, elle me répond : « oui ».
Une étoile s’éclaira dans ma conscience tétanisée !
C’est absurde de mourir, à 24 ans. Je ne peux pas admettre que cela n’ait aucun sens, que ça ne serve à rien. Sinon il n’y a qu’à se suicider, tout serait plus simple, et pourtant je n’avais pas l’impulsion à le faire.
On naît, on meurt. Entre les deux, il y a la souffrance. A quoi bon cette vie ?
Je chercherai la paix intérieure et quand je l’aurai trouvé, j’aiderai ceux qui la cherchent. Je le ferai pour toi, ma bien-aimée.
C’est ainsi que la Sadhana a commencé.
Ce petit livre n’est pas uniquement un ouvrage présentant les concepts subtils des yogas de l’éveil.
Il se veut pédagogique, en faisant « toucher » la sensation d’être tout ou tout au moins de n’être pas uniquement un mental pensant enfermé dans un corps.
Tout au long de ce texte, vous trouverez en italique des invitations à pratiquer le rappel de la conscience, pour lâcher la lecture quelques instants et ressentir le moment présent.
Dans l’attention totale à ce présent, la conscience du moi disparaît, même si c’est provisoire. Cela éveille la sensation de l’Unité.


« Entrez profondément dans le silence. Regardez la lumière qui est l’Atma. Alors, par le pouvoir de l’Atma, tout votre être sera illuminé. »
Maa
Introduction
Il arrive dans la vie, des moments où se concentrent des choix essentiels. Des moments où le feu de notre âme nous rappelle à l’action juste.
Il est maintenant ce moment où nous sommes invités, à la faveur d’une mystérieuse conjonction, à quitter le port et reprendre la mer, à partir vers l’inconnu.
Il est maintenant ce moment où nous pouvons oser
chercher ce que nous sommes en vérité.
Cette aventure est d’autant plus impérative que les formes nouvelles du spirituel restent enfermées dans des recherches de « toujours plus », qui ne sont que le désir d’un super-ego, avec toujours un manque essentiel.
Il s’agit de démystifier la quête essentielle. Il s’agit de se libérer de la fascination pour les magies de puissance. Il s’agit de ne plus se laisser hypnotiser par l’appel du merveilleux.
Il s’agit de voir tous ces pièges qui droguent les consciences humaines, maintenant le chercheur spirituel dans un infantilisme sclérosant.
Les temps ne sont plus à l’adoration des héros, des demi-dieux, des maîtres, ni à la recherche de quelques secrets cachés, mais à la reconnaissance de notre liberté spirituelle souveraine, à l’aventure libre enfin de la conscience et de la joie.
L’éveil à notre liberté essentielle apparaît comme un but de la vie spirituelle. Cet éveil donne le sentiment d’être soudain.
Cependant les événements qui y conduisent sont progressifs. Y aurait-il un processus décelable ?
Parfois des événements tragiques comme la mort d’un être cher, une maladie grave, la perte d’une carrière, contribuent à affaiblir la carapace de notre identité.
Car finalement, c’est bien par la perte de nos illusions que la vérité apparaît. Cela peut survenir de façon brusque, cela peut survenir de façon progressive. Tout dépend du regard.
Pour faciliter la vision d’ensemble de cette proposition, nous allons l’aborder par une expérience personnelle. Un cheminement avec l’Atma yoga, à partir de ma rencontre avec un maître spirituel, rencontre qui se fit justement suite à un effondrement.
Puis nous porterons notre attention sur une tradition millénaire, l’Advaita Vedanta, la voie de la Non-dualité. Cette tradition, toujours vivante, et si vaste a tant de choses à nous dire.
Enfin nous poserons un regard sur le devenir de notre monde, et notre place dans l’évolution.
Car, après avoir cherché à sortir de la souffrance, après avoir trouvé une plénitude intérieure, se pose cette question : nous, tous ensemble, où allons-nous ?
C’est mon cheminement évolutif qui se dévoile, commencé consciemment depuis maintenant 33 ans, après un choc violent avec la vie. S’il peut aider quelques personnes à mieux comprendre là où elles vont, ce livre sera un merveilleux cadeau.
Le chemin que je vous invite à découvrir s’appelle l’Atma yoga. Il conduit à l’éveil par la pratique intérieure. Il s’agit d’un chemin traditionnel. Je n’ai jamais été attaché à la tradition, mais avec le recul m’apparait la beauté et la valeur de cette démarche qui consiste pour une personne de se faire accepter par un maître. On demande pour devenir disciple. Cela n’a rien à voir avec le fait de payer un stage d’initiation…
Chemin de diverses pratiques spirituelles qui balisent l’évolution de la conscience
Chemin d’accompagnement qui permet de traverser les différentes résistances de l’ego.
Chemin solitaire aussi car souvent on se sent seul au milieu du monde.
Avec du recul, ce chemin ne fut pas si difficile, même s’il y a eu des périodes de doutes, de désespoir, de lassitude. Mais impossible de retourner en arrière. Seul le « faire du sur-place » est possible.
Il y a eu des décisions fortes à prendre, des choix de vérité difficiles à réaliser.
Il y a eu l’isolement et la solitude, et aussi le dépouillement matériel. Mais il y a eu aussi la providence. Et là, une certitude s’installe.
« Quand tout va mal, il faut chanter Dieu, il faut chanter Dieu, même sans y croire. Cela agit toujours », m’avait dit une religieuse malicieuse.
Et il est toujours venu du secours. Il vient toujours. Je l’ai vécu de nombreuses fois.
Un jour, je faisais du stop ; la faim me tenaillait le ventre. Je fouillai dans ma poche à la recherche de quelques sous pour acheter une demi-baguette. Rien. Plus un sou. Dépité et dubitatif quant à ma situation, je commençais à m’inquiéter. Alors pour occuper mon mental, je fredonnais «Mon Seigneur et Mon Dieu, je m’abandonne à Toi»: Quelques instants plus tard un vieux paysan s’arrêta et proposa de m’emmener dans sa 4L. Lorsque je descendis de sa voiture, il me tendis alors un billet de 10 Francs, sans que je ne lui ai dit quoi que ce soit à propos de de ma faim, et de mon dénuement. Qu’est ce qui a poussé ce vieil homme pauvre à me donner de l’argent alors qu’il ne connaissait pas ma situation?
La providence agit. J’en fis plusieurs fois l’expérience. Est-elle réservée à certains élus? Je ne le pense pas, mais ce que je crois c’est que souvent nous ne la voyons pas à l’oeuvre. Alors qu’elle est toujours là!
La providence a une action pédagogique, elle nous tend la main pour nous conduire plus loin. Et ce plus loin, c’est toujours tout autre chose que ce que l’on croit.
Souvent, quand on est en chemin spirituel, on souhaiterait passer plus de temps à méditer, avoir moins de contraintes, se trouver dans un lieu plus propice. Mais nous sommes tous exactement là où nous devons être. Si nous devions être en longue retraite, nous y serions, si nous devions vivre en Inde, nous y vivrions. Si tel n’est pas le cas, c’est que la vie nous indique que ce que nous devons apprendre est exactement là où nous sommes, tout au moins pour le moment.
J’ai fini par le comprendre, mais j’y ai mis du temps. Parce que l’univers et Dieu sont Un. Ce qui implique qu’il n’y a pas la moindre opposition entre ici et là-bas, entre l’action dans le monde et la contemplation de l’âme.
Il faut juste vivre au mieux, d’instant en instant, c’est-à-dire dans un accueil détendu….essayant de rester réceptif à la grâce par une attention bienveillante.
Chacun a son chemin. Il est inutile de le comparer avec d’autres. Tous mènent au même but, car il en a qu’un. Mais certains sont très tortueux, d’autres directs...
J’ai commencé le chemin avec le Kriya Yoga, je l’ai poursuivi avec le Jnana Yoga. Et cela m’a conduit à l’Atma yoga.
La réalisation ultime : tout est Un ne peut s’opérer par le mental, parce que le mental n’est pas l’instrument adéquat pour cela. La Vérité c’est l’Unité. Le reste c’est le chemin, le chemin infiniment varié.
La purification est la partie principale du yoga. Comprenons bien ce mot. Il a été tellement perverti en Inde. La purification concerne les attitudes du mental : l’orgueil, la peur, le bavardage intérieur qui empêche d’entendre l’appel de Dieu.
Purification du sens de la dualité conflictuelle qui nous fait naître à la vision de l’Unité, à la vision de la Vérité.
C’est un travail qui doit se faire en secret et en silence.
C’est en 2004, lors d’une retraite méditative que j’ai pu découvrir ce que je cherchais depuis des années. J’ai réalisé alors ce que décrivent les sages et les mystiques depuis des millénaires. Une conscience Une et éternelle se trouve derrière tous les phénomènes de notre monde. Le « moi » n’est qu’une bulle provisoire, baignant dans une conscience infinie et lumineuse.
La quête a cessé, mais pas le chemin. Une autre étape de vie a commencé. D’abord dans le secret du cœur, puis maintenant dans une ouverture au monde.
J’ai hésité longtemps à témoigner de ce que je venais de vivre. D’abord je ne rencontrais personne que cela pouvait intéresser. J’étais changé, tout en ayant bien sûr toujours la même personnalité.
Mais maintenant, je savais que j’étais conscience ouverte et illimitée. La paix et la joie habitait en moi, il n’y avait plus de manque, plus de peurs.
La personnalité avec ses besoins et insatisfactions s’était effacée. Le monde apparaissait désormais comme un jeu ou une pièce de théâtre !
Il me fallut des années pour réussir à verbaliser tout cela avec justesse.
Je me suis rendu compte que cette réalisation n’était pas si rare. Et que ma conscience restait tout de même présente au monde. En ce monde je suis avec ce corps encore quelque temps, alors vais-je garder mon trésor secret ? Ne concerne-t-il que ma personne, alors que nous sommes Un ?
Nous sommes tous sur cette planète en chemin d’évolution, pouvons-nous pressentir où il va nous mener ?
Peut-être, par ce livre, prendrez-vous conscience de ce qui vous anime dans vos choix?
Ou peut-être verrez-vous ce qui bloque pour connaitre l’éveil ?
Ce désir d’éveil vient-il de l’ego insatisfait, ou est-il le fruit d’un appel intérieur ?
Peut-on faire quelque chose pour favoriser l’éveil ? Y a-t-il quelque chose qui est de notre part, pour inviter la Grâce ?
Si ce petit livre vous permet d’y voir plus clair, il aura atteint son objectif. 


Extrait publié avec l'aimable accord des Éditions Charles Antoni-L'Originel