mardi 24 juin 2008

• Ici au Centre, Je suis Vous ! - Douglas Harding

Les onzes portes

Douglas Harding

Quelles que soient nos origines, la société nous a tous tronqués, émoussés, rétrécis, en petites choses limitées et mortelles appelées êtres humains, séparées, solitaires, pleines de toutes sortes de peurs, enfermées dans la prison de nos conditionnements.
Nous imaginons maintes façons de nous échapper : acharnement au travail, télévision, shopping, sexe, drogues, spiritualité. Nous croyons que notre prison n’a pas de porte, mais en fait il n’y en a pas moins de onze, grandes ouvertes vers la liberté. Comme nous allons le voir.

J’AI BESOIN D’ETRE LIBERE DE LA CULPABILITE ET DE TOUTES SORTES D’EGOISMES ET AUTRES DEFAUTS.
Le but essentiel, la passion dominante de ma vie d’adulte a été l’union avec sa Source. Cependant j’ai l’impression d’empirer au lieu de m’améliorer ! (En fait, c’est que sans doute je suis de plus en plus conscient des tours que joue l’ego secrètement pour survivre et s’épanouir.) De toute façon, je suis de plus en plus consterné par la vilénie de Harding. Son salut ne sera pas facile ! Il lui faudra plus qu’un sauvetage ordinaire.

IL M’EST DONNE ONZE CORDES DE SECURITE, ONZE VOIES DE LIBERATION DISTINCTES, QUI CHACUNE SUFFIRAIT A ME CONDUIRE EN LIEU SUR.
Car tels sont la bonté, la générosité débordante, le sens de l’humour, la sollicitude, l’expertise parfaite de ma Source au Centre. Il est impossible d’éxagérer la force combinée des Onze. Je découvre, à ma grande stupéfaction, que déjà –

(1) JE SUIS INFINI
Quand je désigne du doigt ce à partir de quoi je regarde, je vois que cela s’étend à l’infini, dans toutes les directions – vers le haut et vers le bas, à gauche et à droite, en avant et en arrière – et toujours aussi vivant.
Quelle stupéfaction également de réaliser que je suis si grand, si ‘explosé’, sans jamais le remarquer, encore moins comprendre le sens et la valeur de cette infinitude.
Regardez maintenant ce que votre index désigne REELLEMENT lorsqu’il désigne ce qui est au-dessus de vos épaules, et vous verrez exactement ce que je veux dire.
Etre l’Explosion superbienveillante et subnucléaire continuelle aurait déjà été une libération largement suffisante. Mais pour faire bonne mesure, il y a au moins dix autres portes attendant chacune avec impatience son tour de s’ouvrir !

(2) JE SUIS PUR
« Si vos péchés sont comme l’écarlate, ils deviendront blancs comme la neige. S’ils sont rouges comme le vermillon, ils deviendront comme la laine. » Ainsi chante le prophète Esaïe dans l’Ancien Testament.
Le pardon des péchés est, bien sûr, l’un des thèmes essentiels du Nouveau Testament. Son sujet principal, en fait.
Dans son livre, Conscience Intuitive, Ajahn Sumedo, qui est à la tête du Bouddhisme Théravada au Royaume Uni, écrit : « La Conscience est déjà pure. Vous n’avez pas besoin de la purifier. Vous n’avez pas besoin de faire quoi que ce soit… Notre véritable nature est pure. Quand nous commençons à réaliser cela, à l’apprécier et à faire preuve de confiance, nous voyons que c’est vrai. Ce n’est pas théorique, ce n’est pas abstrait, ce n’est pas une idée – c’est la réalité… Vous avez toujours été pur. »
Personnellement, il me suffit de faire pivoter mon attention de 180°, et de regarder Ce Qui regarde, pour voir que c’est absolument non-contaminé et non-contaminable.

(3) JE SUIS LIBRE
Spontané, imprévisible, en liberté. Je ne sais pas – personne ne sait – ce que je vais faire dans l’instant qui suit. De plus, il y a des signes évidents que des créatures de toutes sortes sont aussi libres que moi, qu’elles le réalisent ou non.
Par exemple, j’observe le vol zigzaguant du papillon qui va de fleur en fleur, les aller-retour fantasques de la mouche, en piqué, sur la vitre de la fenêtre ou sur la table, les gestes inopinés de cette main qui vous fait signe de bienvenue ou d’adieu. Dieu sait quelle bonne idée ou quelle stupidité va sortir du stylo que je tiens. Je corrige : Il ne sait pas ! S’Il le savait, Il m’aurait lié pieds et poings. Il aurait transformé l’esprit libre que je suis en un robot, un automate cybernétique très inférieur à une mouche.
« Vous saurez la vérité et la vérité vous libérera », dit Jésus de Nazareth. Et le Tao te king – ce classique chinois – attribue au sage éveillé la spontanéité d’un nouveau-né.
Mais à part quelques appels à la liberté de ce genre, toutes les grandes religions, chacune à sa façon, enseignent que la véritable piété est la soumission à la volonté toute puissante de Dieu. Si les esclaves et leurs maîtres ont une religion, c’est celle-là, c’est bien celle-là ! Pas étonnant que nos églises soient vides !
Pour parler crûment, Dieu a changé d’avis. Et au lieu de s’entourer de serviteurs, Il recherche des amis – des amis sincères qui ont choisi librement cette superbe relation.

(4) JE SUIS
Je suis certain de cela. Qui plus est, c’est la seule chose dont je sois absolument certain. C’est la Réalité Eveillée.Tout le reste est peut-être un rêve.
Je n’ai pas seulement le droit inaliénable de dire JE SUIS, mais je suis obligé de l’affirmer sans cesse. Je suis fait ainsi. Quand la Réalité m’est servie, c’est le Menu.
Dix,vingt, cent fois par jour je m’entends dire JE SUIS. JE SUIS seul, JE SUIS triste, JE SUIS très bien aujourd’hui, merci beaucoup, JE SUIS inquiet, JE SUIS très occupé en ce moment. Et ainsi de suite, continuellement. JE SUIS né ainsi.
C’est une nouvelle merveilleuse. C’est ma guérison et ma plénitude, ma déification en dépit de ma « Hardinginitude ».
Ou bien SUIS-JE en train de barboter la tête en bas dans ma petite mare aux canards d’ETRE privée ?
NON ! La vérité évidente et stupéfiante c’est que je ne puis être sans être l’ETRE MEME.

(5) JE SUIS ICI
Quand je dis que quelque chose est situé ici, que cela signifie-t-il ? Est-ce près, est-ce accessible, est-ce intime ? Quand je décris quelque chose comme ce quelque chose, quelles sont ses limites ? Où cette chose commence-t-elle, où finit-elle ?
Cela dépend. Dans la même seconde je peux parler de ce poumon, ce pays, ce groupe de galaxies. En fait mon ceci et mon ici sont sans limites dans leur immensité et leur petitesse. Je suis infiniment élastique.
Et je prends ce fait au sérieux. Je me pose la question à moi-même : QUI est Celui Qui peut à volonté se dilater et se contracter aussi facilement et naturellement ? quelle est la véritable identité de ce faiseur-de-miracle ?
Je réalise que seul l’UN qui est ma Source et mon Centre correspond à cette définition. Et ce n’est pas une idée à méditer de temps en temps : c’est une expérience à vivre tout au long de mon existence.

(6) JE SUIS MAINTENANT
De même, lorsque je dis qu’un évènement se produit maintenant, que cela signifie-t-il ? Combien de temps dure le moment présent, si l’on peut parler de durée ?
A nouveau, cela dépend. Je m’entends parler si allègrement de cet éclair, cette semaine, cette décennie, ce millénaire. La vérité est que je contiens autant de temps qu’il m’est nécessaire de temps en temps. Et le paradoxe, c’est qu’en contenant le temps je le maîtrise, et je peux reprendre à mon compte avec enthousiasme les paroles de Ludwig Wittgenstein : « La mort n’est pas un évènement dans la vie ; nous ne vivons pas pour faire l’expérience de la mort… Notre vie n’a pas de fin tout comme notre champ visuel n’a pas de limites ».
En résumé : je suis la conscience qui observe qu’elle n’a pas de commencement, ni d’interruption, ni de fin, et je ne mourrai jamais.

(7) JE SUIS AUTO-CREE
Voici la grande porte, la porte-clef, la plus importante des Onze. Toutes les autres sont secondaires, nécessaires, certes, mais en aval de la Source.
Voici le résumé de l’histoire terrestre de l’UN qui accomplit « l’impossible », c’est-à-dire que, sans aucune aide ni aucune raison, Il se crée Lui-même avant d’être, avant même que Rien ne soit.
(a) En décembre 1945, un pot de terre contenant 13 livres gnostiques reliés en cuir fut découvert accidentellement en Haute Egypte. Ces livres contenaient 52 textes « secrets » écrit en Copte. Sans doute avaient-ils été enterrés il y a quelques quinze siècles par les moines d’un monastère voisin de peur que l’Eglise Catholique ne les découvre.
Parmi ces textes « hérétiques » s’en trouvait un attribué aux Gnostiques Barbelo. Honneur et louanges à leur maître anonyme qui, quelques décennies seulement après la crucifixion de Jésus, fut le premier à parler de Celui qui s’auto-génère.
Bon nombre de textes gnostiques ultérieurs (un Gnostique est littéralement celui qui sait) tiennent le même langage. Par exemple : L’Evangile des Egyptiens : « Ton grand nom est sur moi, O Toi l’Auto-Créé qui n’est pas en-dehors de moi ». Bien que chrétiens pour la plupart, ils furent pratiquement exterminés par les catholiques bien avant l’an 500 ap J.-C..
(b) Environ 800 ans ap J.-C., à la cour de l’empereur Charlemagne, le philosophe irlandais John Scotus Erigena enseignait que ce n’est pas CE QUE Dieu est qui est capital, mais QU’IL SOIT.
(c) Le célèbre philosophe allemand, Leibnitz (1646-1716), avec sa doctrine des Monades, était du même avis.
(d) En 1935 un autre philosophe allemand, Martin Heidegger, écrivait : « Pourquoi y a-t-il quelque chose plutôt que rien ? De toute évidence, c’est la première de toutes les questions… Chacun de nous est effleuré au moins une fois, peut-être plus qu’une fois, par la puissance cachée de cette question, même s’il n’est pas conscient de ce qui se passe. » Et il parle ensuite du Fondement de l’Etre qui suscite cette question essentielle. (Introduction à la Métaphysique)
(e) Au même moment à peu près, Ludwig Wittgenstein, le philosophe autrichien que j’ai déjà cité, écrivait que ce n’est pas CE QU’est l’univers qui est mystique, mais LE FAIT QU’il existe.
(f) Au cours du dernier demi-siècle, j’ai partagé avec un grand nombre de gens l’émerveillement de l’auto-création de l’Etre. Ils sont au moins quelques centaines. Rien d’étonnant à cela ! Cela fait partie de la réalisation essentielle qui se produit aujourd’hui aux endroits les plus invraisemblables. Et c’est une cause de joie immense dans un monde qui manque terriblement de joie. C’est aussi ma fin – c’est à dire mon but et ma cessation, ma disparition délibérée en votre faveur.

(8) JE SUIS INCONNAISSABLE
Lequel est digne d’adoration, le Dieu Roc-solide qui doit forcément être, ou le Dieu Océanique auto-créé qui n’est pas obligé d’être ?
Loin de L’inquiéter, le fait qu’Il ignore totalement comment Il se produit Lui-même est une bénédiction céleste à partager avec ses amis. Révéler le secret de l’Auto-Création serait la dépouiller de toute sa fascination, de tout son charme, de toute sa puissance. Cela nous plongerait la tête la première dans un enfer d’ennui éternel.

(9) JE SUIS TOUS CEUX QUI VOIENT
A partir de quoi le scorpion, l’octopus, le chimpanzé, le jeune enfant regarde-t-il, selon son expérience personnelle ?
Certainement pas à partir d’un visage de scorpion, ou d’un visage d’octopus (s’il en a un), ou d’un visage de chimpanzé, ou de mon propre visage d’enfant ou d’adulte. Toutes les créatures qui voient regardent à partir du Seul et Même Espace Vide. Non pas espace vide-pour-le-vide, mais espace-vide-pour-se-remplir, espace d’accueil pour les autres visages. Cette Capacité primordiale – abnégation totale – est le brillant et charmant Visage Originel dont parle le Bouddhisme Zen.

(10) JE SUIS TOUS LES ETRES SENSIBLES
Ne puis-je alors être un avec le sourd, l’aveugle, toutes créatures souffrant d’un handicap ? Bien sûr que si. Aucun être sensible ne peut être sans être moi, sans être L’ETRE MEME. En fait, il est impossible de surestimer la puissance cumulative de ce système d’évasion universel à onze portes ?
Considérez l’immense pouvoir caché de la question : « Comment se font la structure ordonnée et la bonne marche de l’univers ? »
Exactement, quel est le plus souhaitable des pouvoirs, celui qui a la portée la plus considérable, et qui pourtant nous est donné ?
C’est tout simplement le pouvoir de prendre, d’absorber et d’enlever la souffrance de tous les êtres sensibles.

(11) JE SUIS VOUS
CE QUE je regarde est mon problème, et CE A PARTIR DE QUOI je regarde est sa solution. Et – paradoxe des paradoxes ! – la véritable solution, c’est que vous, ainsi que tous les autres, et certainement pas moi-même, êtes ma Guérison, l’Antidote contre mon ego-centrisme invétéré. Ici au Centre, Je suis Vous !

Au commencement, je vous ai promis onze portes grandes ouvertes pour sortir de la prison de notre conditionnement, et j’ai tenu ma promesse.

Alors, prenons le large !

Vu sur le site de Douglas Harding


VOIR :

S'éveiller à sa vraie nature grâce à la "Vision sans tête" - Atelier du 26 et 27 novembre 2005. Atelier et échanges avec Douglas et Catherine Harding accompagnés de Bill Garside, Judy Bruce et José Le Roy.

Pour sa dernière venue en France, Douglas Harding, accompagné de quelques amis, présente avec simplicité un accès direct à notre Vraie Nature : "la Vision sans tête". Ici et maintenant, par le retournement sans détour de notre attention, se dévoile l'incomparable absence de tout ce que nous avions crû ou croyons être. Dans la vacuité et avant toute sensation, émotion ou concept, "la Vision sans tête" nous permet d'aborder la non-dualité de manière très pratique.

Lien menant à la possibilité de commander le DVD.

lundi 23 juin 2008

• Éveillez-vous ! - Nisargadatta Maharaj

Éveillez-vous !

Nisargadatta Maharaj

Nisargadatta Maharaj : Vous dites que vous êtes l’observateur de tout ce qui se passe et de tout ce que vous voyez, mais quel est cet observateur, quelle est l’identité de ce « je » qui observe ? N’est-il pas illusoire ? Vous vous êtes identifié avec tant de choses dans ce monde objectif, et vous poursuivez tant de désirs et de tendances différentes, vous vous rendez ainsi d’un endroit à un autre, à la recherche du bonheur, mais toute ces activités, sans réelle compréhension, ne vous apporteront que des déceptions. Essayez de comprendre vraiment ce que vous êtes – car c’est seulement en Cela que réside la satisfaction
absolue.

Ce monde objectif ne constitue pas votre « véritable demeure » - c’est pourquoi vous n’êtes pas heureux. La source sous-jacente de tout ce monde objectif est votre « véritable foyer », retournez-y et soyez satisfait, oubliez le monde même lorsque vous y vivez. L’état de sommeil profond est presque équivalent à votre « véritable demeure ». Le sommeil profond est très relaxant et régénérateur, car vous retournez plus ou moins à votre état originel et véritable. Dans cet état, la conscience « je» n’est pas présente, ni la connaissance de la personnalité, car la personnalité s’est plus ou moins dissoute dans l’état originel.


Le yogi n’est pas une personne. Le véritable yogi est celui qui a « avalé » cette conscience Je suis et a fusionné avec elle, il est alors, le Maha-Yogi (grand yogi). En fait, c’est seulement par votre propre Maya (illusion) que vous voyez ce monde, toutefois, Maya n’est qu’une sensation, une apparence, ce n’est pas la Réalité.

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Nisargadatta Maharaj : Quoi que vous « ne soyez pas » (corps, mental, intellect, etc.), vous l’avez accepté et en fait, substitué à la réalité et à cause de cela, il y existe une certaine peur.
Toutefois, lorsque vous connaîtrez votre véritable état, vous serez capable d’aller à peu près partout, sans aucune peur. Si vous pouviez vous voir réellement tel que vous êtes, alors, il n’y aurait plus de peur de la mort ni de quoi que ce soit d’autre.

Quoi que vous possédiez (et vous possédez une sorte de faux courage), vous dites « mon corps, mon mental » etc., mais, en réalité, ils ne sont pas du tout à vous. Vous vous êtes arrogé la possession de choses qui ne sont pas réellement vôtres. Vous êtes, depuis toujours, différent de ces choses. Dans l’état de rêve quelqu’un vous dit quelque chose, mais ni la personne qui vous parle, ni la personne qui écoute, n’est réelle, car toutes deux n’existent que dans le rêve. C’est exactement notre situation, en ce moment. Je suis l’enseignant et vous êtes ceux qui écoutent, mais, ce n’est que dans le rêve ou l’apparence. Lorsque vous vous éveillez complètement, il n’y a ni enseignant, ni enseignés.


Une fois que j’ai réalisé la nature de cette conscience de Je suis : i.e. comment elle est apparue sur mon état véritable, qu’elle est réellement quelque chose d’illusoire ; lorsque j’en ai donc pris pleinement connaissance, alors, la conscience de Je suis, (dans laquelle est contenu l’univers entier), se dissout et se fond dans le Moi. À la lumière de cette conscience de Je suis, l’univers entier s’est formé, mais la lumière de cette conscience de « Je » n’est rien d’autre que la réflexion de la lumière de l’état véritable ou Réalité.


La conscience de Je suis est le monde, et il n’y a rien de mal dans le fait de voir ou d’être témoin de ce monde. L’erreur vient seulement lorsque vous le prenez pour réel, comme nous le faisons pratiquement tous. Dès que vous émergez de l’état de rêve, pour entrer dans l’état de veille, vous rejetez systématiquement le rêve et dites qu’il n’était pas réel, que ce n’était qu’un rêve. De même, l’état de veille dans lequel nous percevons ce vaste univers, avec toutes ses étoiles et ses planètes etc. est également un rêve, je le répète donc, éveillez-vous à votre propre Réalité. Éveillez-vous ! Arrêtez de rêver, tout simplement.


Ce monde n’a jamais vraiment existé, il n’a jamais été créé, c’est un rêve ! Alors sachez-le, et réalisez-le ! C’est tout.


Une fois que vous avez pleinement absorbé cette compréhension, plus rien n’est nécessaire, plus de questions ou doutes ne peuvent se poser. Existe-t-il quelque chose d’aussi simple, et, en même temps, d’aussi sublime ?

vendredi 20 juin 2008

• La Conscience ne meurt ni ne renaît jamais - Nisargadatta Maharaj

La Conscience ne meurt ni ne renaît jamais

Nisargadatta Maharaj

Sri Nisargadatta Maharaj est un sage dans la pure tradition indienne. Sa façon particulière d'éviter la notoriété et la richesse, de mener une vie très humble, dans son petit logement sans prétention des faubourgs de Bombay, en sont un témoignage. Il affirme dans son style si personnel :

« Laissez les autres aider le monde, construire de grands Ashrams et prendre des disciples. Pour moi, toutes ces activités ne sont que vanité et illusion. Puisque je n'ai besoin de rien et suis complet en moi-même, pourquoi devrais-je m'ennuyer avec tout ce lucre et activités mondaines et triviales ? »

Son message simple éclairera le chemin de nombreux chercheurs authentiques de Vérité, en ces temps troublés où tant de prétendus Gurus et hommes de Dieu prônent toutes sortes de chemins et techniques pour retrouver quelque chose que nous n'avons en fait, jamais perdu. Son message est très simple, il n'est pas habillé de symbolismes ésotériques ou secrets. C'est un raccourci si simple qu'une personne sans discernement, pourrait passer à côté ou même ne pas y adhérer du tout.

Le sage dit que la Vérité est nue, et elle est là, aux yeux de tous, pour être vue, et si quelqu'un vous dit qu'elle est cachée, ésotérique ou secrète, alors, soyez certain que cette personne n'a rien compris à la Réalité ou à la Vérité. La gloire et la grandeur d'un sage tel que Nisargadatta* Maharaj est au-delà de ce que l'on peut concevoir et raconter - c'est une gloire véritable pour chacun de nous, que nous en soyons conscients ou non, et je me sens béni, en ces temps troublés, d'être capable de partager avec le monde entier, un peu du nectar inestimable que sont ses mots, ses pensées et discours.

*Nisargadatta : celui qui donne l'état naturel ou originel.


Nisargadatta Maharaj : Quand vous êtes un individu, vous avez certains besoins, mais lorsque vous vous fondez dans le Soi, vous n'avez plus ces désirs. Quand un homme devient un Jnani, il perd tout sens d'être un individu et il se meut librement, sans espoir et sans peur, il est absolument sans peur et sans aucun désir. Ce ne sont pas les oreilles qui entendent, ni les yeux qui voient, le corps en lui-même est insensible, c'est le Soi au-dedans qui donne la sensation de vie au corps. Le corps n'est qu'un instrument du Soi, il n'est pas le Soi.

Aussi longtemps que vous aurez la conscience ou l'idée du corps, vous serez sujet au bonheur et au malheur, mais si l'idée du corps vous quitte, même maintenant, alors que vous êtes dans le corps, le bonheur et le malheur vont également disparaître et vous resterez avec votre vraie nature, à tout jamais «complète» et sans aucun besoin.

Pour l'homme réalisé, il n'existe rien tel que le corps, le mental, l'intellect, etc., car ce ne sont que des idées. Je n'ai même pas l'idée d'agir pour le bien du monde en transmettant cette connaissance. Aucune notion de bien ou de mal n'est avec moi, il n'y a pas de telles distinctions ou motivations. Je suis complètement libéré de toutes ces fausses notions et idées

≈≈≈≈≈≈≈≈

Nisargadatta Maharaj : Quand Krishna dit : «Je me souviens de toutes mes naissances passées», il veut dire qu'il se souvient de Je suis, qui est le sentiment fondamental derrière toute naissance. Il n'y a pas de «je suis untel ou untel».

Question : Vous devez pourtant croire avoir vécu auparavant ?

Nisargadatta Maharaj : C'est ce que disent les Écritures, mais je ne sais rien de cela. Je me connais en tant que Je suis.

Comment suis-je apparu et comment apparaîtrai-je, ne se situent pas dans le champ de mon expérience. Ce n'est pas que je ne me souvienne pas. Il n'y a rien à se rappeler. La réincarnation implique un soi qui se réincarne. Cela n'existe pas ! La somme de souvenirs et d'espoirs appelée «je» s'imagine exister éternellement, et crée le temps pour accommoder sa fausse éternité. Je n'ai besoin ni de passé, ni de futur pour être.

Toute expérience naît de l'imagination. Je n'imagine pas, il n'y a donc, ni naissance ni mort pour moi. Seulement ceux qui pensent être nés, peuvent se penser nés de nouveau. Vous m'accusez d'être né - je plaide non coupable ! Tout existe dans la Conscience et la Conscience ne meurt ni ne renaît jamais. C'est la Réalité immuable.

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Nisargadatta Maharaj : Quand vous comprenez «l'essence de vous», vous savez, alors, que toutes les anxiétés et peurs n'appartiennent qu'au monde, et ne sont pas vôtres. Quand vous voyagez en train, vous ne bougez pas, seul le train le fait. De même, tout arrive, apparaît et disparaît, mais vous êtes la Réalité immuable, le témoin. «L'essence» n'a besoin de rien. Vous pouvez pratiquer une sadhana ou n'importe quoi d'autre - le mental doit faire quelque chose, mais sachez que tout cela est bien futile, qu'il n'y a là rien à perdre ou à gagner.

Vous pouvez aider les gens et les conseiller, mais d'abord, soyez installé dans la connaissance de votre essence, et sachez que dans un sens ou dans l'autre, cela n'a aucune importance - le détachement. Pour toute connaissance spirituelle, vous devez d'abord être là.

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Satya Sai Baba affirme être l'incarnation d'un certain Sai Baba de Shirdi, antérieur, et affirme, également, qu'il est venu pour sauver le monde ; je le respecte tout à fait pour cela, mais je connais ma vraie nature, ou position, dans laquelle il n'existe pas de monde à sauver !

Il est venu pour sauver un monde illusoire, je lui souhaite bonne chance, en ce sens je le respecte. En définitive, nous sommes en train de discuter de choses qui n'ont jamais existé.

Le comprenez-vous ?

Extraits chosis pour ÉVEIL IMPERSONNEL
de NISARGADATTA - Notes
paru aux Editions Antoni - l'Originel

jeudi 19 juin 2008

• Tout n’est jamais que cet Absolu non-duel - Mark West

Tout n’est jamais que cet Absolu non-duel

Mark West

Durant les onze mois que j’ai passés auprès de Nisargadatta Maharaj, en 1976-77, je lui ai, en général, rendu visite, deux fois par jour, quatre ou cinq fois par semaine. A cette époque, j’habitais dans une petite chambre d’hôtel, à Bombay. J’ai commencé par prendre des notes, en utilisant ma version personnelle de la sténo et profitant que le discours était encore frais dans ma mémoire, je le retranscrivais plus clairement, quand je retournais dans ma chambre.
Par les graines qu’il a semées, ces inestimables « graines de conscience », j’ai réalisé que j’étais la vérité et que je l’avais toujours été et le serai toujours. La vérité, c’est que rien n’est arrivé – tout n’est jamais que cet Absolu non-duel.
Aussi, bien que je sois ému de partager mes souvenirs avec vous, le lecteur de ces lignes, ce récit des expériences de ma vie est en réalité une histoire, un concept. Cela étant dit, retournons à ces merveilleux événements « changeurs de vie » de la fin des années 1970.

Question : En bref, quel conseil donneriez-vous à un chercheur ?


Mark West : Eh bien, si un chercheur venait me voir, je lui dirais qu'il est déjà ce qu'il cherche, et que, de ce fait, la recherche elle-même constitue un problème. S'il pense, que dans le futur, il obtiendra ce qu'il cherche, et que la recherche a lieu à travers le mental ou le «moi», s'il pense que dans le futur, il sera capable de comprendre, il se trompe complètement. Car il n'y a vraiment pas de futur. Tout est, ici et maintenant, omniprésence. La présence est déjà là.

Ce qu'ils recherchent, ils le sont déjà. Je leur dirais d'abandonner la recherche, mais cela pourrait les blesser. En effet, lorsque je suis rentré d'Inde, j'étais très enthousiaste et je l'ai dit aux gens, alors que je n'aurais pas dû.

Question : Vous ne vous définissez pas comme un missionnaire ?

Mark West : A son retour d'Inde, une personne de ma connaissance est tombée dans ce piège. Maintenant je sais, qu'à moins qu'on ne me questionne directement sur la spiritualité, je n'en parlerai pas de moi-même.

Question : Et la dernière question est : «Qui s'en préoccupe ?»

Mark West : Oui, c'est vrai. Oui. (Rires)

Je peux en rire maintenant - vraiment en rire ! Cette entité qui essaye d'attraper quelque chose, c'est complètement inutile !

Maintenant, c'est en quelque sorte, une vie sans effort. Un sentiment indicible de totale liberté. Il y a aussi un sentiment d'amour universel, ce n'est pas du tout l'amour personnel, c'est quelque chose que j'aimerais tant donner et partager.

J'aimerais le partager avec chacun, mais je me rends compte que cela doit arriver de soi-même.

Il n'y a, ici, personne qui puisse s'attribuer le mérite de quelque chose ni même s'angoisser pour quoi que ce soit.

Extraits choisis pour Éveil Impersonnel de
Nisargadatta - Notes
Éditions Antoni - l'Originel

mercredi 18 juin 2008

• Interview d'Eckhart Tolle par Oprah Winfrey

"Nouvelle Terre" : S'éveiller au but de sa vie

Interview d'Eckhart Tolle par Oprah Winfrey

A partir de début Mars 2008 et tout les lundis pendant dix semaines, un événement sans précédent a eu lieu : la célèbre animatrice de télévision américaine Oprah Winfrey à reçu Eckhart Tolle pour commenter son livre "Nouvelle Terre", dans une émission diffusée en direct sur Internet.

Cet échange, où l'on traite de spiritualité avec un des grands enseignants de notre temps, a été visionnée et téléchargée par des millions de personnes à travers le monde.

Les vidéos, fichiers audios ou transcript d'origines sont disponibles sur www.oprah.com

En voici une traduction Française.

Un grand, très grand, merci à Ted pour ce travail de traduction audacieux et magnifique !

INFO
de dernière minute :

désormais, toutes les vidéos ont été mises en ligne

mardi 17 juin 2008

• La conscience semblable à l'espace - Bob Adamson

La conscience semblable à l'espace

Bob Adamson

Vous êtes cet un-sans-second, qu'il y en ait réalisation ou pas

Donc, ce qui se passe, c'est que cette forme apparaît en tant que corps-esprit et vous l'appelez « vous ». Ce n'est qu'une forme d'énergie, apparemment fermée. Mais quelle est la première chose que vous voyez ? L'espace ou le vide. Et l'espace ne peut se voir. Toutefois à travers cette forme, il se voit, il se connaît lui-même. Rappelez vous que nous utilisons cette métaphore de « la conscience semblable à l'espace », c'est donc la présence - conscience qui se voit et se connaît elle-même.

Toute cette manifestation est constituée de formes, différentes formes qui voient des formes. C'est seulement la présence-conscience s'exprimant en tant que formes. On les appelle aussi « différentes choses » mais en réalité ce n'est que le déploiement de la présence-conscience.

Q : Dans la tradition spirituelle, il y a ce désir de se connaître, qui naît chez le chercheur. Comment est-ce relié à cela ?

Le désir de se connaître soi-même est la tentative de trouver quelque réalité à cette forme. Quand elle (la conscience) réalise qu'elle ne peut la trouver ni dans le mental ni dans le corps, elle se tourne alors réellement vers elle-même.

Q : Et elle ne trouve rien.

Non, car elle n'a jamais quitté ce qu'elle était.

.../...

Q : Je pense que ce qui nous limite dans notre compréhension, c'est la façon dont nous voyons les choses. Si nos yeux étaient comme des microscopes électroniques et si nous pouvions voir les choses au niveau de l'infiniment petit, alors il n'y aurait rien d'autre ici qu'énergie. Je comprendrais alors que cette main ne soit juste qu'un espace vide. Cet oeil ne peut voir que superficiellement - la surface, mais à un niveau plus profond, l'énergie devient apparente. Cette énergie est ce que vous appelez présence-conscience, est-ce bien cela ? Et l'énergie apparaît sous diverses formes.

Oui, et les formes ne sont que cela, en réalité. Nos yeux ne peuvent pas voir à ce niveau. Il est difficile pour nous de voir que l'image que nous avons de nous-mêmes, n'est pas la réalité. Tout comme le microscope nous révèle quelque chose grâce à la vision, en regardant cette image que nous croyons être, nous voyons qu'elle n'est pas réelle.

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Les Bouddhistes l'appellent «non-née ». «Non-né » veut dire sans origine. Elle n'a donc pas d'origine, pas de commencement. Elle est sans début et sans fin. Elle ne connaît ni le temps, ni l'espace. Elle est sans corps, sans mental. Elle n'est rien. Pourtant c'est l'essence dans laquelle tout apparaît et disparaît. C'est ce que vous êtes en réalité.

Vous voyez, cela supprime les limites que nous nous imposons. Puis vous pouvez voir que les noms que nous nous donnons, les mots sont le facteur limitant. Vous vous appelez « un être humain » et vous appelez Dieu « l'être suprême ». Retirez l'étiquette « suprême » et l'étiquette « humain », que reste-t-il ? L'être. Sans l'étiquette, sans le nom, pouvez-vous séparer cet être ?

.../...

Mais si vous comprenez ce que nous disent les Écritures, que c'est l'un-sans-second, l'omniprésence, l'omniscience, cette présence, alors vous voyez et vous savez que tout est Cela. Vous ne vous en êtes jamais éloigné. Le savoir entraîne un sentiment de sécurité total. Sachez que vous n'êtes jamais né, que vous ne mourrez pas, que vous êtes hors du temps, de l'espace, que vous n'avez ni corps, ni esprit. Tout continue de se passer, mais pour qui ?

Extraits choisis pour Éveil Impersonnel, avec accord de l'éditeur, de
Quel est le problème maintenant, si vous n'y pensez pas ?
Bob Adamson - Éditions Antoni-l'Originel

lundi 16 juin 2008

• Voici le moment du Soi - Jannicke Wiel

Voici le moment du Soi

Jannicke Wiel


Penser qu'on peut
devenir réalisé est une absurdité. Si nous sommes le Soi, alors être suffit largement. En essayant de devenir, nous perdons de vue ce que nous sommes.

Si, dans le contexte de notre vie spirituelle, nous tenons à tout prix à nous lancer dans un mouvement, que ce soit alors vers l'intérieur. Cela consiste à laisser aller. Nous pouvons laisser aller la pensée dualiste. Il surgira immédiatement un sentiment accru de liberté. Nous nous arrêtons dans le moment présent, imbus de sa perfection et de sa plénitude, et nous oublions vite les vielles idées selon lesquelles il nous faut essayer, faire des efforts, accomplir et cheminer vers un but furur.

Ce moment même en est un de plénitude. Il renferme toute la beauté du monde, toute la tranquillité de l'être. Il n'y a rien à atteindre dans le futur. Voici le moment du Soi. Voici le moment de l'être. Si nous ne le portons pas aujourd'hui, nous le portons encore moins demain ! Cela glisse alors continuellement vers un furur de plus en plus éloigné, à moins de choisir de l'être et de le vivre aujourd'hui.

Quand la réalisation n'est plus perçue comme un but, la lutte pour l'atteindre disparaît.

Extraits choisis tirés du numéro 53 de la revue 3eme Millénaire

jeudi 12 juin 2008

• Dans son état véritable, l'Esprit est nu, immaculé

Dans son état véritable, l'Esprit est nu, immaculé

TÉMOIGNAGES - suite et (sans) fin

- I -

Je me souviens des sessions du milieu de l'après-midi lorsque tout le monde était fatigué, assoupi, luttant contre le sommeil. Moi, j'étais tellement heureux. Nous pouvions aller voir le maitre zen pour qu'il nous pose ses impossibles questions. Je souriais à moi-même. « Oh ! J'en connais la réponse. » Et je me contentais de rester simplement assis. L'énergie s'élevait, s'élevait. Pour finir, j'allai voir le maitre et il me posa l'un des plus vieux koans, ponctué d'un petit geste de la main. Avec ce geste, la chambre entière s'effaça. Tout avait disparu - le vent, les étoiles, les chiens au dehors. Nous disparûmes tous dans la même immensité. Il n'y avait rien, il y avait tout. Je me mis à rire et à rire, émerveillé. Je connus l'esprit de mon maître et l'âge du monde. Mon corps était transparent, le souffle du vent devint ma respiration et mes pas la terre en mouvement. Après cela, ma vie fut très joyeuse, vivante ; mes peurs les plus anciennes furent balayées, elles disparurent tout simplement. J'étais enfin vraiment vivant. Même si pendant des semaines et des mois j'ai souri, ce fut une période bizarre. Dans la communauté, je ne parlai à personne de ce qui m'arrivait car je savais que les gens, d'une manière ou d'une autre, se sentiraient exclus. C'est ainsi que je devins très vite conscient de toutes les limites douloureuses du monde et compris comment, même à l'intérieur de cette grande ouverture, les limites doivent absolument être respectées.

- II -

C'était au début de ma vie spirituelle. J'étais allé à quelques cours de méditation et maintenant j'étais tranquillement allongé, seul, me reposant après tant de temps passé à penser et à m'interroger. Mon esprit était dans un état des plus clairs et des plus ouverts. Il se sentait rechargé, vivant et dans le même temps totalement calme. Je n'avais jamais su qu'un tel équilibre de vivacité et de détente était possible. Je pris un vieux texte bouddhiste et en lus quelques lignes :

« Bien que l'Esprit soit, il n'a pas d'existence. Dans son état véritable, l'Esprit est nu, immaculé, par nature Vacuité, transparent, éternel, non composé ; on ne peut le réaliser comme une entité séparée mais comme l'unité de toutes choses, sans pour autant être composé par elles. S'élevant d'elles-mêmes et naturellement libres, comme les nuages dans le ciel, toutes les choses qui apparaissent s'évanouissent à nouveau... La totalité du monde et du nirvana, unité inséparable, est notre propre esprit. »

Tout ce que je savais du monde éclata en morceaux. Je n'aurais pu dire ce qu'il en restait car rien de moi n'avait subsisté. Seul demeurait ce qui est présent avant que l'idée de soi n'existe jamais. Je compris une bonne fois pour toutes qu'il n'y a pas de soi, que toute idée de soi est une illusion. Nous sommes vides, comme un rêve, un jeu de l'esprit. Peu à peu une partie du monde revint, bien que, sous de nombreux aspects, ma manière de le percevoir ait totalement changé. Comment étais-je supposé vivre désormais ?Je n'en avais aucune idée. Pendant des semaines je tournai en rond dans une sorte de légèreté et d'état de choc.

- III -

Un jour de printemps, durant une période de pratique intensive, j'étais en train de manger. Pendant bon nombre de jours, j'étais resté assis à me débattre et à faire beaucoup d'efforts, déterminé à abattre toutes les barrières et à faire jaillir toute la vérité - qui j'étais, quelle pratique j'étais en train de faire. J'élevai mon bol et soudain tout devint clair. Les choses sont bien telles qu'elles sont ! Le monde entier est complètement, profondément entier. Je n'avais pas besoin de faire quoi que ce soit. Je n'avais pas besoin d'essayer avec tant d'acharnement. En disant cela maintenant avec des mots, cela peut sembler très terre à terre, mais ce fut une révélation gigantesque, stupéfiante, qui instantanément coupa court à toutes mes questions et me libéra des centaines de manières par lesquelles j'avais toujours essayé de changer ou de figer le monde et moi-même. Une dimension physique surprenante était également présente. Tout mon corps disparaissait, la coquille ou le réceptacle de moi-même s'évanouissait, le fond du monde se dérobait. Je n'avais pas une forme distincte de celle du monde. Tout mon mode d'être se libéra et changea au fil des mois qui suivirent, à tel point que les gens commencèrent à me demander ce qu'il s'était passé.

Extraits choisis pour Éveil Impersonnel de l'ouvrage :
Après l'extase, la lessive

de Jack Kornfield - Éditions de La Table Ronde

mercredi 11 juin 2008

• Seule est réelle cette conscience non née

TÉMOIGNAGES

- I -

J'étais dans l'ashram, en train de pratiquer avec un petit nombre d'étudiants avancés. J'avais éprouvé beaucoup de douleurs physiques au cours des dernières semaines mais je continuai malgré cela à m'asseoir, encore et toujours, sans bouger. Mon esprit était posé, tout à fait centré. Mes pensées diminuèrent jusqu'à pratiquement disparaître et ma conscience émergea au centre de mon coeur. Lorsqu'un son, une sensation ou une pensée s'élevait, je la ressentais immédiatement comme une subtile vibration ondulant à travers l'espace de mon coeur. C'est tout ce que je ressentais. C'était comme si le calme de mon coeur s'étendait au monde entier. Toutes les expériences devinrent comme de petites vibrations, des vagues évoluant subtilement à travers ce coeur vaste et paisible.

Puis je m'abandonnai davantage et pénétrai la sérénité la plus profonde qu'on puisse imaginer, sans même un son ni une sensation si subtile soit-elle. C'était totalement silencieux et vide. Je ne ressentais plus du tout mon corps ou mon esprit, j'étais pure conscience. Toute mon identité s'effaça. C'était à couper le souffle, fantastique, au-delà de la félicité Je sus qu'après cela je ne pourrais plus jamais avoir peur de la mort car seule est réelle cette conscience non née, cette conscience éternelle.

- II -

J'étais en montagne et je me réveillais tôt, lorsqu'il faisait encore sombre. Je m'asseyais ainsi, très calme, jour après jour et l'expérience la plus merveilleuse et la plus terrible arriva. Je disparus. Tout ce que j'étais fut balayé. Au début je fus incapable de nommer ce qui m'arrivait. Vous ne pouvez lui donner un nom, pas même celui de nirvana, car c'est bien au-delà des mots. Une telle feiicité ! Je sus que ce n'était plus mon propre coeur ni mon propre corps, c'était le coeur et le corps du monde.

- III -

À cette période, après plusieurs mois, j'avais seulement besoin de trois ou quatre heures de sommeil. Ma seule instruction était de rester absolument présent et attentif et, quoi qu'il arrive, de ne pas réagir. Tant de pensées et d'émotions étaient venues puis reparties. Il y eut des jours d'intense solitude, de larmes et de chagrin, et des moments de ravissement. Certains jours, j'avais l'impression de mourir, mon corps tombait en morceaux. J'étais entouré d'un monde de mort et de destruction. Puis tout redevenait normal. J'avais l'impression de flotter au fil des heures de méditation, parmi des vagues de lumière et d'extase, mon corps se dissolvant, ouvert comme le ciel, sans limites.

Plus je devenais calme, plus les expériences s'élevaient rapidement. C'était maintenant comme si je pouvais remarquer chaque pensée malgré leur flot constant. Chaque forme-pensée créait un monde d'idées, de souvenirs ou un monde imaginaire qui s'évanouissait dès qu'il était repéré. Dans le silence profond de l'esprit, je commençai à sentir les subtiles pré-pensées, comme si l'esprit, telle une femme enceinte, était prêt à donner vie à la pensée suivante. Les sons, les odeurs, les émotions, chaque perception, si petite soit-elle, était reconnue, libérée ou plutôt laissée libre de faire surface, perçue comme une luciole dans la nuit. Je conservais cette attention en m'asseyant, en marchant, me sentant souvent comme sij'étaii sous l'eau, dans un monde calme et transparent.

Un après-midi, je m'étendis pour méditer dans la chaleur de la journée. Mes yeux étaient clos et, sans effort, j'eus conscience de toutes les sensations de cette nouvelle posture. Toutes mes perceptions flottaient, s'élevant et disparaissant comme des bulles d'eau gazeuse. Je sentis mon être s'abandonner à cela et les perceptions arrivèrent encore plus vite, comme si l'univers vibrait rapidement - pulsations de lumière, comme des lucioles. Un moment de crainte se fit jour puis disparut, mon esprit s'ouvrit et d'une certaine manière sombra ; tout était parfaitement silencieux, au-delà du silence. Il n'y avait plus de moi, plus d'expérience, plus rien : aucun mot à associer à cela, seulement une compréhension. Le monde demeurait dans un océan de paix d'où toutes les manifestations s'élevaient puis disparaissaient. C'était formidable. Je sus que l'essence de la conscience était cette paix immense. Une chose était sûre : tous les phénomènes et moi-même étions simplement une manifestation de l'esprit. Au-delà de ce monde où tout naît, se transforme et meurt, il y a la réalité omniprésente. Toutes ces apparences reparurent, bien sûr, mais elles étaient plus lumineuses, plus transparentes, plus éclatantes de joie.

Extraits et témoignages choisis pour ÉVEIL IMPERSONNEL
Tirés du livre "Après l'extase, la lessive" - Jack Kornfield
Éditions de La Table Ronde

mardi 10 juin 2008

• Chaque instant est éveil

Chaque instant est éveil


La semaine méditative d'une sesshin zen était toujours pour moi très intense. Je ressentais un profond relâchement émotionnel et des souvenirs puissants s'élevaient comme si je me trouvais dans un processus de naissance : fortes douleurs et catharsis physiques qui se prolongeaient des semaines durant lorsque je rentrais chez moi.

Cette sesshin débuta de la manière habituelle : les premiers jours, je me débattis avec de puissantes émotions et le jaillissement des énergies qui déferlaient à travers mon corps. A chaque fois que je voyais le maître, il était assis, là, comme un roc. Sa présence me stabilisait tel un gouvernail au milieu de flots sombres et tumultueux. J'avais l'impression que j'allais mourir ou exploser et lui me poussait à plonger dans mon koan, à laisser mon être s'y abandonner totalement. Je n'aurais su dire où commençait et où s'achevait ma vie.

Puis une douceur étonnante commença à filtrer. Derrière la fenêtre, je vis trois jeunes arbres, des bouleaux qui étaient comme ma famille. Je me sentis aller caresser leur écorce lisse et je devins l'arbre touchant ma propre personne. Ma méditation s'emplit alors de lumière.

J'avais déjà expérimenté la félicité auparavant - durant certaines retraites, de grandes vagues de bonheur lorsque mes douleurs physiques se dénouaient - mais celle-ci était d'un autre ordre. Toute lutte cessa et mon esprit devint lumineux, rayonnant, aussi vaste que le ciel, empli du plus exquis parfum de liberté et d'éveil. Je me sentais tel le Bouddha, assis sans effort, heure après heure, soutenu e tprotégé par l'univers entier. Je vivais dans un monde de paix infinie et de joie indicible.

Les grandes vérités de la vie étaient tellement claires : la manière dont la saisie cause la souffrance, le fait que, menés par cette étroite idée de nous-mêmes, cet ego fictif, nous nous agitons dans tous les sens comme de petits propriétaires se querellant pour un rien. Je pleurai sur toutes nos peines inutiles. Puis durant des heures, je ne cessai de sourire et de rire. Je vis à quel point tout est parfait et comment chaque instant est éveil, pour peu qu'on s'ouvre à lui.

Je restai ainsi, pendant des jours, dans cette paix complète et intemporelle. Mon corps flottait, mon esprit était vide. Quand je me réveillais, des vagues d'amour et une énergie joyeuse coulaient à travers ma conscience. Puis les prises de conscience et les révélations se succédèrent. Je vis comment le flot de la vie se déroule en une trame que nous modelons selon le courant de notre karma. Je vis toute idée de renoncement spirituel comme une sorte de jeu consistant à vouloir contraindre notre être à abandonner la vie ordinaire et les plaisirs. En fait, le nirvana est ouvert, tellement ouvert, joyeux, tellement joyeux, tellement au-delà de tous ces petits plaisirs auxquels nous nous accrochons. Vous ne renoncez pas au monde, vous recevez le monde.

Extraits de Après l'extase, la lessive - Jack Kornfield
Éditions de La Table Ronde

lundi 9 juin 2008

• Chant de réalisation - Karmapa

Chant de réalisation

Karmapa

Demeure dans cette dimension profonde sans distraction.
Inutile de discipliner le corps ou la parole,
Tout arrivera spontanément.
En elle, il n'y a rien à réaliser ;
Comprends tout ce qui est apparent
Comme étant sans existence propre.
Tous les phénomènes sont sans ego
Et le Dharmadathu, le royaume de l'esprit,
Est complètement libre de concept.
La grande connaissance transcendante
Par delà la dualité
Est le pur esprit en lequel tout est équanimité.
Tandis que le grand fleuve coule sans relâche,
Toutes les méditations assises que tu fais silencieusement
Portent en elles des bienfaits.
Elle est donc continuellement la nature de Bouddha,
Illumination.
Le monde tout simplement n'existe pas ;
Et tout est grande félicité.
Tout phénomène, la moindre chose,
Est vide en essence
Et, étant vide,
Ne peut être saisi par l'esprit.
Nous sommes alors automatiquement purifiés de l'attachement.
Au-delà de l'intellect
Rien ne surgit dans l'esprit.
Elle est le chemin de tous les Bouddhas,
Des êtres éveillés.

• L'idée d'un chemin n'aurait même pas lieu d'être - Lama Wally

L'idée d'un chemin n'aurait même pas lieu d'être

Lama Wally


La base
Tous les êtres recèlent la nature éveillée de l'esprit : ceci est la base. Cette nature de bouddha est pure conscience. Elle peut être décrite comme étant vide, vacuité, comme l'espace mais elle est néanmoins connaissante.
Elle constitue le fondement de chaque être et est, en essence, non duelle. Cependant, nous ne la reconnaissons pas comme telle. Cet esprit est recouvert par des voiles, des obscurcissements, qui induisent un fonctionnement dualiste entre un sujet et des objets extérieurs.
Nous considérons que nous sommes différents et séparés des autres. Plutôt que d'expérimenter la conscience primordiale fondamentalement pure, nous expérimentons la solidité d'un "soi", d'un "je", d'une personne, en un mot d'un ego. Tout ce que nous vivons, la manifestation de cette nature fondamentale, va alors confirmer l'expérience de l'ego. Du fait de ce dysfonctionnement, de cette séparation, un processus en trois mouvements se met en place: celui de l'attachement, de l'aversion et de l'indifférence.
S'attacher signifie s'approprier ce qui nous semble bénéfique pour nous-mêmes. Par la colère, l'aversion, nous rejetons au loin ce qui nous déplaît. L'un et l'autre de ces mouvements d'humeur engendrent la souffrance. D'autre part, nous restons sans réaction, indifférents à ce qui ne nous rapporte rien ou ne nous gène pas. La conscience présente, fondamentale et pure, est recouverte par les voiles de nos tendances et celles-ci s'élèvent à cause de l'identification et de l'attachement à nos pensées et à nos émotions.
Si nous ne reconnaissons pas la nature vide et transparente de la pensée, immédiatement nous en faisons une expérience solide, concrète. Dès l'instant où nous n'avons pas conscience de la dimension transparente et fluide des pensées, la confusion s'établit. Les habitudes d'attachement, d'aversion et d'indifférence n'ont pas simplement un effet immédiat, elles se traduisent en terme de karma, c'est-à-dire en actions qui mûriront beaucoup plus tard sous forme d'expériences.
Cela se traduit en terme de cycle, le cycle des existences, dans lequel différents états de confusion se succèdent. Ne reconnaissant pas notre nature fondamentale, recouverte et voilée, la question se pose de savoir ce que nous allons faire pour sortir de la souffrance. Cette interrogation fait naître l'idée de la nécessité d'un chemin à parcourir. Si nous reconnaissions simplement ce que nous sommes fondamentalement, l'idée d'un chemin n'aurait même pas lieu d'être.

Le chemin
Le sens du chemin est de dissiper les différents voiles afin de reconnaître notre nature fondamentale. (.../...) Il est nécessaire de percevoir quels sont les processus en jeu dans le fonctionnement de l'esprit. Pour cela il nous faut pratiquer chiné et lhaktong, la pacification de l'esprit et la vision pénétrante. Nous sommes débordés par toutes les pensées qui jaillissent constamment et nous ne sommes pas pleinement conscients des situations que nous vivons. Ces pratiques proposent une véritable investigation de l'esprit pour aboutir à une vision directe de sa nature. La première étape est la pacification de l'esprit, l'entraînement à l'attention consciente. Nous découvrons que les pensées ne sont pas des choses solides, matérielles ou concrètes; plus nous méditons, plus nous sommes conscients de leur transparence. Nous ressentons un sentiment de liberté car nous saisissons moins les pensées, nous sommes moins dépendants d'elles, nous les laissons plus aisément se dissiper.
L'étape suivante consiste à approfondir cette vision des pensées et à essayer de reconnaître leur véritable nature.
Par cette reconnaissance, l'illusion est complètement dissipée. C'est ainsi que nous découvrons notre liberté naturelle. Tant que nous serons trompés par les pensées, tant que nous les prendrons pour quelque chose de solide, de réellement existant, le corps et la parole vont agir en fonction de ces pensées comme des serviteurs. En découvrant leur nature fondamentale nous nous libérons, nous n'agissons plus sous leur impulsion et c'est la fin du cycle.

Le fruit
Le troisième aspect est le résultat, le fruit. Le fruit d'une telle pratique est la reconnaissance de l'état naturel de l'esprit, la conscience fondamentale. Il s'agit non seulement de la reconnaître mais aussi de s'établir en elle de manière définitive. Certains fruits de la pratique apparaissent dans la méditation mais ce sont des fruits relatifs qui se dissipent d'eux-mêmes.

Question : Comment pouvons-nous prendre conscience que nous sommes libres sachant que nous sommes gouvernés par nos tendances ?
Lama Wally : Les tendances sont en elles-mêmes une expression d'enfermement et d'ignorance. Durant la première étape du processus de la méditation, nous prenons seulement conscience que nous sommes animés par des tendances récurrentes. Progressivement, nous les laissons s'élever et se dissiper d'elles-mêmes sans en dépendre. C'est un soulagement de voir comment nous pouvons nous détacher de ces tendances et commencer à voir leur dimension transparente.

Question : Si nous observons nos tendances dans la méditation, il y a toujours un sujet et un objet, il y a toujours une dualité. Comment faire ?
Lama Wally : Dans les pratiques de chiné et de lhaktong, il suffit de se détendre de plus en plus. C'est essentiel, car plus nous sommes tendus, plus nous avons ce sentiment de solidité et plus ce sentiment de solidité se développe, plus la dualité est renforcée. Le processus consiste à se détendre dans cet état naturel de l'esprit et à lâcher prise sur ce qui se passe.

Question : Comment prendre conscience de nos tendances ?
Lama Wally : Plus nous sommes agités, plus nous sommes distraits et plus les tendances se renforcent. Il faut s'asseoir sur son coussin et s'entraîner le plus possible à la vigilance. Sur ce chemin, la patience est nécessaire. Chaque fois que nous nous rendons compte que nous sommes distraits, que nous sommes influencés par nos tendances, il suffit simplement de revenir à la vigilance, c'est en cela que consiste la pratique.
Fondamentalement il est suffisant de voir, de reconnaître la tendance et la façon dont nous nous sommes investis dans celle-ci. C'est un entraînement qu'il faudra reprendre encore et encore, que ce soit sur le coussin de méditation ou dans l'activité. C'est sur le coussin que nous développons d'abord l'habitude de l'attention consciente.

Conclusion
Pour conclure, nous pouvons pratiquer chiné durant une session de méditation pour nous donner la saveur de ce qu'est la pratique. Nous nous asseyons le plus confortablement possible, le dos complètement droit et le reste du corps complètement détendu. Nous suivons le mouvement de la respiration et nous respirons de façon très douce, très naturelle. Lorsque nous inspirons, l'esprit se détend, s'apaise, et lorsque nous expirons, nous lâchons prise, nous laissons les choses en l'état. Nous suivons le mouvement de la respiration : inspire, expire, lâcher prise.
Accomplissant cela, nous prenons conscience qu'il y a toutes sortes de mouvements dans l'esprit. Nous ne prêtons pas attention à ces mouvements, à ces pensées et les laissons simplement s'élever. Aucune pensée n'est plus importante qu'une autre. Ainsi, laissant s'élever les pensées sans les saisir, elles se dissipent et disparaissent d'elles-mêmes, il n'y a pas d'autre façon de faire. Nous ne bloquons pas les pensées, nous ne nous en débarrassons pas. Nous les laissons s'élever et nous lâchons prise. En suivant ces instructions, l'esprit va se pacifier progressivement.

Pour conclure la méditation, nous dédions l'activité bénéfique de la pratique, l'activité de la méditation mais aussi de l'écoute et de la réflexion à tous les êtres en faisant le souhait qu'ils puissent être connectés au Dharma et réaliser l'éveil.

Extraits choisis pour Éveil Impersonnel.
Source du texte


jeudi 5 juin 2008

• Le Soi est, par nature, déjà atteint

Le Soi est, par nature, déjà atteint

Haritayana

Tes efforts pour refouler le monde extérieurs sont en eux-mêmes excellents. Tous ceux qui connaissent le Soi t'approuveront. Sans ce genre d'effort personne n'a jamais pu atteindre le Soi. Mais ces efforts ne son pas la cause (karana) de l'atteinte du Soi car celui-ci est, par nature, déjà atteint. S'il n'était pas quelque chose 'qu'il n'est pas besoin d'atteindre' comment serait-il 'soi-même' ? Il est absolument 'hors d'atteinte'. Aussi bien, le contrôle de l'esprit n'est-il pas en lui-même le 'moyen' de l'atteindre ? Laisse moi te justifier cela par un exemple. Un objet quelconque n'est pas visible à cause de l'obscurité. Mais voici qu'on apporte une lampe, et c'est comme si l'on mettait la main (pour la première fois) sur cet objet...

Il ne convient pas d'aller au loin pour le trouver : c'est en demeurant sur place qu'on l'a constamment à sa disposition. Il ne faut pas raisonner pour le connaître : c'est lorsqu'on ne raisonne pas qu'il se manifeste. Qui donc réussira à rejoindre l'ombre de sa propre tête en courant après elle ? De même qu'un petit enfant peut voir mille choses reflétées dans un miroir immaculé sans soupçonner la présence même du miroir, de même les gens perçoivent le reflet des mondes dans le grand miroir de leur propre Soi et ne discernent pas le Soi lui-même, faute d'être instruit à son sujet. Ainsi l'homme qui n'est pas informé de l'existence de l'espace perçoit bien le monde visible mais non l'espace, son substratum. Prends bien soin de noter, cher époux, que l'univers est fait de la connaissance et du connaissable. Or la connaissance est auto-établie, puisque sans elle, rien n'existerait. Elle s'impose d'elle-même, sans le secours des moyens de connaissance droite (pramanas), car ces derniers ne sont eux-mêmes connus qu'à travers elle. Originellement établie, son existence n'a pas à être démontrée : c'est elle, au contraire, qui est l'âme de toute démonstration.
Tripurarhasya, Éditions Fayard (traduction de Michel Hulin)
Vu sur le site de Serge Car

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Ranjit Maharaj

L'éveil n'est rien d'autre qu'une profonde et totale compréhension. La réalité n'a pas à être atteinte, elle est déjà là. Rien n'est nécessaire au-delà de cette compréhension totale.

Les méthodes engendrent d'innombrables frustrations et ne donnent aucune satisfaction réelle. La réalité est sans méthode. L'illusion dispose de nombreuses méthodes, de nombreux problèmes, et de nombreux concepts. Pour vaincre l'illusion, ou les concepts, il faut se demander d'où proviennent toutes ces pensées. Penser concerne toujours des objets. Pour connaître la réalité dépourvue de pensée, il n'est nul besoin de penser.


Les gens ne comprennent pas que l'illusion n'est rien. Comment peut-elle vous empêcher ? Comment 'rien' peut-il vous empêcher ?

• Seul demeure le Soi - Ramana Maharshi

Seul demeure le Soi

Ramana Maharshi

Question : Quand un homme réalise le Soi, que voit-il ?

Ramana Maharshi : Il n'y a pas de vision. La vision est simplement l'être. L'état de réalisation, comme on l'appelle, n'est pas l'atteinte de quelque chose de nouveau ou d'un but lointain, mais seulement d'être ce que vous ne cessez pas d'être, et ce que vous avez toujours été. Tout ce qu'il vous faut, c'est de cesser de réaliser comme vrai ce qui ne l'est pas. Nous regardons tous comme réel ce qui ne l'est pas. Nous n'avons, en ce qui nous concerne, qu'à perdre cette habitude. Nous réaliserons alors le Soi et tant que Soi ; en d'autres mots "soyez le Soi". A un certain moment, vous vous moquerez de vous même en vous voyant chercher à découvrir le Soi qui est tellement évident. Que pouvons-nous donc répondre à cette question ? Ce stade transcende et le voyant et la vision. Il n'y a pas de voyant et il n'y a rien à voir. Le voyant qui a cette vision cesse à l'instant d'exister, et seul demeure le Soi.

Extrait de Sois ce que tu es, Éditions Adrien-Maisonneuve

mardi 3 juin 2008

• L'être réalisé ne voit que le Soi - Ramana Maharshi

L'être réalisé ne voit que le Soi

Ramana Maharshi

Question : Je veux pratiquer le karma-yoga. Comment puis-je aider les autres ?

Ramana Maharshi : Qui est celui que vous devez aider ? Qui est ce "je" qui se prépare à aider les autres ? Eclaircissez ce point d'abord et tout le reste se résoudra de lui-même.

Q : Cela veut dire qu'il faut réaliser le Soi. Est-ce que ma propre réalisation peut être une aide pour les autres ?

R M : Oui, et c'est le plus grand service que vous puissiez rende aux autres. Mais en réalité, il n'y a personne d'autre à aider, parce que l'être réalisé ne voit que le Soi ; il est comme l'orfèvre qui ne voit que l'or quand il évalue les bijoux fait en or. Quand vous vous identifiez à votre propre corps, noms et formes sont présents. Mais sitôt que vous transcendez la conscience du corps, le reste disparaît. Celui qui est réalisé ne voit pas le monde différent de lui-même.

Q : Ne vaudrait-il pas mieux que les saints se mêlent aux autres pour les aider ?

R M : Il n'y a pas d' "autre" à qui se mêler. Le Soi est la réalité unique. Le sage aide le monde tout simplement en étant le vrai Soi. La meilleure façon d'aider le monde est de parvenir à un état sans ego. Si vous être très désireux d'aider le monde, mais si vous ne pensez pas pouvoir le faire en parvenant à l'état sans ego, alors abandonnez à Dieu tous les problèmes du monde en même temps que les vôtres.

Q : Ne devrais-je pas essayer de soulager la souffrance du monde ?

R M : La puissance qui vous a créé a aussi créé le monde. Si elle peut prendre soin de vous, elle peut également prendre soin du monde. Si Dieu a créé le monde, c'est son affaire d'en prendre soin, non la vôtre ".

Extrait de Sois ce que tu es
Éditions Adrien-Maisonneuve


≈≈≈≈≈≈≈

Le Bouddha : "Subhûti, qu'en penses-tu ? Tu ne devrais pas dire que le tathâgata formule cette pensée : « Je dois libérer les êtres vivants. » Subhûti, tu ne dois pas penser ainsi. Et pourquoi ? Parce qu'il n'y a en réalité pas d'être vivants que puisse libérer le tathâgata. S'il y en avait, le tathâgata soutiendrait (le concept d') un ego, d'une personnalité, d'un être et d'une vie.
Subhûti, (lorsque) le tathâgata parle d'un ego, il n'y a, en réalité, pas d'ego, même si les gens ordinaires le pensent. Subhûti, le tathâgata dit que les gens ordinaires n'en sont pas, mais qu'on les appelle (par commodité) des gens ordinaires."

Sutra du diamant

lundi 2 juin 2008

• Il n'y avait pas de « moi » distinct...


Il était très jeune, mais avait déjà fondé une famille et c'était un homme d'affaires assez connu. Il semblait très inquiet et très mal en point et avait de toute évidence quelque chose à dire.

- Il y a quelque temps, j'ai fait l'expérience la plus remarquable qui soit, et comme je n'en ai encore jamais parlé à personne, je me demande si je pourrai vous l'expliquer. Je l'espère car je ne peux pas aller voir quelqu'un d'autre. C'était une expérience tout à fait extraordinaire, mais c'est maintenant terminé et je n'en garde que le souvenir. Peut-être pouvez-vous m'aider à retrouver cette impression extraordinaire. Je vais vous dire, le plus exactement possible, ce qui s’est passé. Ce qui m'est arrivé était au-delà de l'imagination et du désir et maintenant je l'ai perdu. Je vous en prie, aidez-moi à le retrouver.

Il s'arrêta un moment puis reprit.

- Un matin, je me suis réveillé de bonne heure, la ville dormait encore, ses rumeurs n'avaient pas encore débuté. J'ai senti qu'il fallait que je sorte, et je m'habillai rapidement et sortis dans la rue. Le laitier n'avait pas même encore commencé sa tournée. C'était le début du printemps, le ciel était bleu pâle. J'avais l'impression qu'il fallait que j'aille dans le jardin public, à quelques centaines de mètres de là. Dès que je quittai le seuil de ma porte, j'eus une étrange impression de légèreté, comme si je marchais sur l'air. L'immeuble d'en face, une monotone série d'appartements, avait perdu toute sa laideur, les briques qui le composaient semblaient vivantes et gaies. Et chaque objet qu'ordinairement je n'aurais pas remarqué semblait soudain extraordinaire et très curieusement, tout semblait faire partie de moi. Rien n'était loin de moi ; en fait le « Moi » n'existait pas en tant qu'observateur, que celui qui perçoit, si vous voyez ce que je veux dire. Il n'y avait pas de « Moi » distinct de cet arbre, ou de ce papier dans le caniveau, ou des oiseaux qui s'interpellaient. C'était un état de conscience que je n'avais encore jamais connu.

- Tandis que je me rendais dans ce parc, reprit-il, je vis une boutique de fleuriste. J'étais passé devant des centaines de fois, jetant à chaque fois un bref coup d'oeil aux fleurs. Mais ce matin-là, je me suis arrêté. La vitrine était givrée à cause de la chaleur et de l'humidité qui venaient de l'intérieur, mais cela ne m'empêcha pas de regarder les différentes sortes de fleurs. Et alors que je les regardais, je me mis à sourire et à rire avec une joie que je n'avais encore jamais ressentie. Ces fleurs me parlaient, et je leur parlais aussi. J'étais parmi elles, et elles faisaient partie de moi. En disant cela, je peux vous donner l'impression que j'étais en pleine crise d'hystérie et que je n'avais plus ma tête à moi. Mais il n'en était rien. Je m'étais habillé très soigneusement, en ayant conscience de mettre du linge propre, de regarder ma montre, de lire le nom des boutiques, y compris celui de mon propre tailleur, et de déchiffrer le titre des livres dans les vitrines des librairies. Tout était vivant et j'avais avec toutes choses une relation d'amour. J'étais le parfum de ces fleurs, c'est-à-dire qu'il n'y avait pas de « moi » pour les sentir, vous comprenez ? Il n'y avait pas de séparation entre elles et moi.

Cette boutique de fleurs était incroyablement remplie de vie et de couleurs, et toute cette beauté devait être saisissante car le temps et sa mémoire avaient cessé. J'ai dû rester là plus de vingt minutes, mais je vous assure que je n'avais pas la notion du temps. Je ne pouvais pas m'arracher à ces fleurs. Le monde de la lutte, de la douleur et de la souffrance était là tout en n'étant pas là. Car voyez-vous, dans cet état-là les mots n'ont aucun sens. Les mots décrivent, séparent, comparent, mais dans l'état où j'étais les mots ne pouvaient pas être. Ce n'était pas le « je » qui faisait l'expérience car il n'existait rien d'autre que cet état, cette expérience. Le temps s'était arrêté, il n'y avait plus ni passé, ni futur, ni présent. Il n'y avait plus que - les mots sont incapables de décrire cela, tant pis, cela ne fait rien. Il y avait une Présence - non, ce n'est pas le mot qui convient. C'était comme si la terre, avec tout ce qui la constituait intérieurement et extérieurement, passait soudain par un stade de bénédiction et que moi, en me rendant au jardin, j'en fasse partie. Et comme je m'approchais de ce jardin, je fus totalement émerveillé par la beauté de ces arbres familiers. Du jaune pâle au vert presque noir, les feuilles dansaient de vie. Chacune m'apparaissait séparément, et chacune renfermait toute la richesse du monde. J'avais conscience que mon coeur battait très vite. Ma condition cardiaque est excellente, mais je pouvais à peine respirer en entrant dans le jardin et je crus que j'allais m'évanouir. Je m'assis sur un banc et je me mis à pleurer. Le silence était difficilement supportable, mais ce silence purifiait toutes choses de la douleur et de la souffrance. Alors que je m'engageais plus profondément dans le jardin, j'eus l'impression d'entendre de la musique. Je fus surpris, étant donné qu'il n'y avait pas de maisons à proximité et que personne ne viendrait avec un transistor si tôt le matin. La musique faisait partie du tout. Toute la bonté, toute la compassion étaient dans ce jardin public, et Dieu y était aussi.

- Je ne suis pas un théologien, ni quelqu'un de religieux, reprit-il. Je n'ai été à l'église qu'une douzaine de fois, et cela n'a jamais rien voulu dire pour moi. Je ne peux supporter ces bêtises que l'on vous fait avaler dans les églises. Mais dans ce jardin public, il y avait un Etre, si l'on peut utiliser ce mot, dans lequel toutes les choses vivaient et avaient leur être propre. Mes jambes tremblaient et je dus m'asseoir à nouveau, m'appuyant à un arbre. Le tronc de l'arbre était vivant, tout comme moi, et je faisais partie de cet arbre, partie de cet Etre, partie du monde. Je crois que je me suis évanoui. Tout cela avait été trop violent pour moi les couleurs vivantes et éclatantes, les feuilles, les rochers, les fleurs, l'incroyable beauté de toutes choses.

Et par-dessus tout cela, il y avait cette bénédiction...

- Lorsque je revins à moi, le soleil était levé. Il me faut d'habitude vingt minutes pour aller au jardin, mais cette fois, j'étais parti de chez moi depuis environ deux heures. Il me semblait que je n'aurais pas la force physique de rentrer, et je restais assis à récupérer mes forces sans oser penser. Comme je reprenais lentement le chemin du retour, je gardais en moi l'intégralité de cette expérience. Cela dura deux jours et s'évanouit aussi brutalement que cela était venu. Et c'est alors que commença mon calvaire. Je ne mis pas les pieds à mon bureau pendant une semaine. Je voulais retrouver le vécu de cette étrange expérience, et vivre à nouveau et pour toujours dans ce monde de béatitude. Tout cela eut lieu il y a deux ans. J'ai sérieusement songé à tout quitter et à partir dans un coin quelconque du monde, mais je sais au fond de moi que ce n'est pas ainsi que je pourrai retrouver cette expérience. Ni dans un monastère, ni dans une église éclairée de cierges, qui tous deux ne s'occupent que de la mort et des ténèbres. J'envisageai de me rendre en Inde, mais j'écartai ce projet. J'essayai ensuite une certaine drogue qui rendait les choses plus éclatantes et des choses de ce genre, mais ce genre d'opium n'est pas ce que je cherche. Ce n'est qu'un vulgaire moyen de parvenir à l'expérience, c'est un artifice qui n'est pas la réalité.

- Et voilà, conclut-il. Je donnerais n'importe quoi, ma vie et tout ce que je possède, pour pénétrer à nouveau dans cet univers. Que dois-je faire ?

- Cette expérience, voyez-vous, est venue sans que vous l'appeliez. Vous ne l'avez pas cherchée. Aussi longtemps que vous la rechercherez, vous ne la trouverez jamais. C'est le désir même de retrouver cet état extatique qui vous empêche de faire une nouvelle expérience de la béatitude. Vous voyez ce qui a lieu : vous avez eu une expérience et vous vivez depuis avec le poids mort du souvenir d'hier. C'est ce qui a été qui fait obstacle à ce qui est.

- Voulez-vous dire que je doive écarter et oublier tout ce qui a été et continuer à mener ma petite vie minable, chaque jour plus affamé intérieurement ?

Si vous ne regardez pas en arrière et ne demandez pas davantage que vous n'avez, ce qui est très difficile, alors peut-être que cette chose que vous ne pouvez pas contrôler aura à nouveau une action. L'avidité, même relative au sublime, suscite la douleur. Et l'envie du plus ouvre la porte au temps. Cette béatitude ne peut s'acheter avec des sacrifices, avec la vertu ou avec de la drogue. Ce n'est ni une récompense, ni un résultat. Elle vient à son heure, et il ne faut pas la chercher.

- Mais cette expérience a-t-elle été réelle, est-elle venue d'en haut ?

Nous cherchons toujours la confirmation de l'autre, pour nous assurer de ce qui a été et nous y trouvons une protection. Se faire assurer ou confirmer dans ce qui a été, même si c'était le réel, c'est renforcer l'idéal et appeler l'illusion. Introduire dans le présent ce qui est passé, que cela soit présent ou agréable, c'est faire obstacle au réel. La réalité n'a pas de continuité. Elle est d'un moment à l'autre, intemporelle et sans mesure.

Krishnamurti
Commentaires sur la vie, tome 2.
Éditions Buchet-Chastel

dimanche 1 juin 2008

• La vague et l'Océan - Stanislas Groff

La vague et l'Océan

Stanislas Groff

La conscience universelle est souvent comparée à l'océan : une masse fluide, indifférenciée, et la première phase de la création correspondrait à la formation de vagues. Une vague peut être considérée comme une entité individuelle, et pourtant il est évident que la vague est l'océan, et l'océan la vague. Il n'y a pas de séparation ultime.

La phase suivante de la création serait une vague se brisant sur les rochers et vaporisant l'air de gouttelettes d'eau, qui existeront en tant qu'entités individuelles pendant une courte période, avant d'être à nouveau avalées par l'océan. Ainsi, nous avons là des moments fugitifs d'existence séparée. Mais imaginons maintenant de l'eau qui s'évapore et forme un nuage. Maintenant, l'unité originelle est obscurcie et cachée par une véritable transformation, et il est nécessaire d'avoir une certaine connaissance en physique pour se rendre compte que ce nuage est l'océan, et l'océan le nuage. Pourtant, à la fin, l'eau du nuage va se réunir avec celle de l'océan sous forme de pluie.

La séparation finale, où le lien avec la source originelle apparaît complètement oublié, est souvent illustrée par un flocon de neige qui s'est cristallisé à partir de l'eau du nuage qui, à l'origine, s'était évaporé de l'océan. On a là une entité très structurée, très individuelle et séparée qui ne comporte, en apparence, aucune ressemblance avec sa source. Maintenant, on a vraiment besoin d'un savoir sophistiqué pour reconnaître que le flocon de neige est l'océan, et l'océan le flocon de neige. Et pour se réunir avec l'océan, le flocon de neige doit abandonner sa structure et son individualité; il doit subir une mort de l'ego, en quelque sorte, pour retourner à sa source.

Stanislas Groff
Extrait tiré du livre de Fritjof Capra
La sagesse des sages - Éditions Tchou

Il y a des vagues dans l'océan. Chaque vague a une certaine forme - une longueur, une largeur et une hauteur - et se déplace dans une direction particulière. Mais sont-elles séparées de l'océan ? Une vague pourrait se sentir séparée et se mettre à la recherche de l'océan, mais est-elle jamais séparée ?

Poonja