vendredi 26 novembre 2010

• Le "je" avait cessé d'exister - René Barbier


Les petits poissons blancs
Ne dirait-on pas tout à fait
L'esprit de l'eau qui court ?

Konishi Raizan (1654-1712)

Il nous arrive parfois de rencontrer cette "inquiétante étrangeté" dont parle Freud très existentiellement. Mais, chez lui, la perspective est tragique. La rencontre n'est pas de bonne augure. D'autres personnes plus ouvertes au "sentiment océanique" découvrent soudainement en elles-mêmes un horizon inimaginable. C'est l'expérience du bodhi de la sagesse orientale. Un "flash" qui bouleverse une vie. Les expériences vécues de "flash existentiel" sont innombrables. Qu'on se souvienne de l'épisode de la "madeleine" détrempée de thé de Marcel Proust ou Marcel Proust et de son sentiment de félicité à la vue du léger déséquilibre provoqué par la différence de niveau entre deux pavés dans la cour de l'hôtel de Guermanteslui rappelant une dalle mal jointée dans le baptistère de Saint-Marc à Venise . Il m'est arrivé, comme à beaucoup d'autres, de vivre ces instantanés de connaissance dans le cours de ma vie. Une fois dans une forêt, au pied d'un arbre dans ma vingtième année ; une autre fois dans le métro, au milieu de la cohue ; une autre fois à la mort de mon père ou encore au cours d'un rêve lucide à l'âge mûr. Cette intuition qu'une bribe de l'essentiel nous est révélée fait partie de l'existence quotidienne, pour peu que l'on sache écouter le moment exceptionnel sans avoir peur.

Fournissons encore quelques exemples puisés dans la littérature ou dans la vie mystique. Jean-Jacques Rousseau dans sa Cinquième promenade des Rêveries du promeneur solitaire nous fait participer à cet instant contemplatif à partir duquel il a le sentiment d'exister et "... où le présent dure toujours, (...) sans aucun autre sentiment de privation ou de jouissance, de plaisir ni de peine, de désir ni de crainte, que celui de notre existence, et que ce sentiment seul puisse la remplir tout entière ; " Plus près de nous, à la fin du siècle dernier, le sage hindou Ramana Maharshi relate sa première et essentielle expérience spirituelle survenue en 1896 : "Ainsi donc en ce jour où j'étais assis seul, je me sentais bien. Mais tout à coup me saisit une peur de mourir sur laquelle il était impossible de se tromper... Le choc de cette peur... me rendit soudainement "introspectif" ou "introverti"... J'éprouvai toute la force de ma personnalité et même... le "Je" en moi, à part le corps... J'étais quelque chose de réel, de très réel, la seule chose réelle en cet état... Depuis ce moment le "Je" ou le "Soi" s'est tenu au foyer de l'attention par une fascination toute-puissante . On pourrait comparer l'expérience du Maharshi avec celle du psychologue Karlfried Graf Von Dürckheim, telle qu'il l'exprimait dans un dialogue avec A. C. Bhaktivedanta, Swami Prabhupada, du Centre rural de Francfort en 1974 :

- "durant la Première Guerre mondiale, lorsque j'étais jeune homme, j'ai passé quatre ans au front. Je suis l'un des deux officiers de mon régiment à ne pas avoir été blessé. Sur le champ de bataille, je vis la mort à maintes reprises. J'ai vu des hommes qui se tenaient tout près de moi être foudroyés, et la force vitale les quitter soudainement. Tout ce qu'il en restait, comme vous le dites, c'était un corps sans âme. Mais, lorsque la mort était proche et que j'acceptais le fait que j'allais peut-être mourir, je me rendais compte que mon moi était une chose totalement étrangère à mon corps... Cette expérience de guerre m'a profondément marqué. Elle a été le commencement de mon cheminement intérieur. " Je possède dans mes archives plusieurs cas cliniques de ce genre, d'ailleurs confirmés par de nombreuses et sérieuses enquêtes en parapsychologie.

1. La notion de "flash existentiel"

Les moments exceptionnels de vie décrits par certains mystiques, mais que nous avons tous connus plus ou moins, m'incitent à tenter une théorisation de ce type de vécu que je nomme le "flash existentiel".

Je préfère le mot "flash" à celui d' "insight" trop connoté par la psychanalyse freudienne. Le terme de "peak experience" (expérience des sommets) d'Abraham Maslow me semble trop statique. Le mot flash renvoie à un éclair photographique qui illumine, en un clin d'oeil, ce que risquait de rester dans la pénombre, ce qui ne pouvait être vu. Il présente l'intérêt d'être quotidien, d'appartenir à la vie de chacun d'entre nous. Car il s'agit bien de cela : le "flash existentiel" nous est donné à tous, à plusieurs moments de notre existence ; il suffit de savoir le vivre et de le laisser fructifier en nous pour changer le cours de notre vie. On trouve la notion de "flash" d'abord chez Michaël Balint pour désigner un nouveau type de relation médecin-malade : c'est le moment où un éclair surgit dans la relation médecin-malade et joue le rôle d'une reconnaissance de nature interprétative, capable d'opérer un renouveau, souvent lié au deuil du "défaut fondamental".

C'est E. Morin qui emploie la notion pour la deuxième fois dans son ouvrage sociologie (Fayard) en distinguant, en même temps, un balzacisme et un stendhalisme sociologiques : "Nous croyons en la nécessité d'un balzacisme et d'un stendhalisme sociologiques. Le balzacisme serait le sens de la description encyclopédique, le stendhalisme serait le sens du "détail significatif". A cela doit s'ajouter le sens de l'instantané ou flash" (p. 167).

Il s'agit bien d'un "instantané" existentiel qui révèle, d'un seul coup, la trame de l'itinérance d'une vie. Le flash existentiel participe à ce que Paul Watzlawick nomme "l'instant éternel" en empruntant une image d'écartement d'huile à la philosophie Zen. En général "notre esprit ne peut saisir le temps dans un sens parménidien de "total, unique, immuable et sans fin", sauf en des circonstances très particulières et fugitives, qu'à tort ou à raison on dit mystiques. " . Prenons l'exemple d'Arthur Koestler dans la cellule des condamnés à mort d'une prison espagnole : "(Il) passa sur moi comme une vague. La vague s'était formée sur l'émergence d'une phrase articulée, mais qui s'évapora tout de suite, ne laissant dans son sillage qu'une essence muette, un parfum d'éternité, un frémissement du trait dans le bleu. J'ai dû rester ainsi plusieurs minutes, en transe, avec une conscience indicible que "cela est parfait.. parfait" (...) Puis j'étais sur le dos, flottant à la surface d'un fleuve de paix, sous des ponts de silence. Il venait de nulle part et ne s'écoulait nulle part. Puis il n'y eut plus de fleuve et plus de "je". Le "je" avait cessé d'exister (...) Quand je dis "le "je" avait cessé d'exister" je me réfère à une expérience concrète qui est aussi incommunicable verbalement que la sensation ressentie à l'écoute d'un concerto pour piano, et pourtant tout aussi réelle - seulement beaucoup plus réelle. En fait, sa première marque est le sentiment que cet état est plus réel que tout autre éprouvé auparavant'".

En fin de compte, deux idées-clé prévalent dans la notion de flash existentiel : celle d'éclairement et celle d'instantanéité.

1. 1. L'éclairement

Par ce terme je voudrais désigner une prise de conscience spécifique qui peut être comprise comme un processus d'élucidation ultra-rapide conduisant à un état de lucidité. La lucidité n'est pas l'explication. Elle ne se réfère aucunement à l'analyse rationnelle des données du réel. La lucidité n'est pas plus la synthèse d'une multitude de fragments du réel reconstituant un univers de significations. Elle est autre chose, une sorte d'ouverture sur un autre système de vision du monde qui remplace, subitement, celui qui nous fondait jusqu'alors.

Elle apparaît comme bouleversante, restructurante. Quelque chose de soi-même se perd d'une manière définitive, aussitôt remplacée par une autre région de connaissance du monde. En même temps, on ressent une impression de vérité absolue, comme si notre destinée émergeait d'un chaos infini pour se donner à voir, l'espace d'une seconde, dans un ordre vital. Une certitude s'inscrit en moi : ce que je vis en ce moment ne pourra plus jamais être effacé, seulement dépassé par un autre flash existentiel. Cet instant éternel marque, d'une pierre blanche, mon cheminement ontologique. J'éprouve alors la conscience d'une vision d'un mouvement fondamental de l'être, de sa structuration.

La lucidité, c'est la conscience du mouvement lui-même se saisissant dans sa globalité et sa non-dualité. Instant contemplatif par excellence où l'agir et la réflexion sont suspendus au profit d'une perception de ce qui est, et se révèle à moi-même, pour moi-même. La lucidité barre le passage au bruit de fond, au superficiel. Elle engendre l'interrogation tout en suscitant l'ouverture vers la voie pertinente. Elle est à la fois mémoire et projet fondus sur la vague du temps instantané. En vérité, elle sort du temps pour s'inscrire dans l'événement absolu, sans observateur, sans observé, pur fait sans passé ni futur, dans la structure duquel "je" suis moi-même totalement inclus.

1.2 L'instantanéité

La seconde composante du concept de flash existentiel se révèle comme étant de l'ordre temporel. Le moment de lucidité est immédiat et sans épaisseur de temps. Tout se passe comme si la vision intérieure de la vie du sujet était donnée en un laps de temps qui, cependant, condense une temporalité passée et future d'une durée beaucoup plus longue. De nombreux témoignages existent prouvant cette instantanéité de la vision sur sa vie passée lors de situations cruciales pour l'être humain. On raconte que certains sujets en situation d'extrême détresse revoient leur vie depuis leur enfance en l'espace d'une seconde.

C'est souvent le cas durant les périodes d'agonie dues à une longue maladie ou à un accident. Ce bouleversement de notre notion occidentale du temps, si linéaire, rationnelle et progressive, ne va pas sans suggérer d'importantes interrogations philosophiques, d'autant que de nombreuses autres cultures pensent le temps d'une façon différente. Dans l'Inde védique, l'attestation d'un Temps indivisible et tout-puissant, au-delà du temps divisible et mesuré, vient au langage essentiellement par le truchement de l'hymne.

C'est dans la poésie et la tragédie que la Grèce antique présentera une conception d'un temps lié aux travaux quotidiens où l'ordre temporel et l'ordre moral sont indissolublement liés, dans une méfiance de la démesure, l'hubris, et dans l'idée d'un temps conçu comme "un dieu qui réconforte" au coeur d'une compréhension par la souffrance que chante le choeur dans Agamemnon d'EschyleC'est la conception islamique du temps qui s'oppose tout autant au temps cyclique qu'au temps linéaire. Conception temporelle telle une "saisie discontinue des instants ponctuels", "voie lactée d'instants" comme disait Louis Massignon, qui se présente "comme autant de points de tangence du temps humain et de l'éternité divine" écrit Louis Gardet. Ou encore, en Afrique Noire, chez les Bantou pour lesquels il n'existe pas de substantif théorique pour indiquer le temps comme dans la culture européo-américaine.

Chez les Bantou il n'est question que du temps de ceci et cela, du temps propice à ceci et cela. Comme le souligne Paul Ricoeur "la pensée bantoue offre l'idée d'un temps estampillé par l'événement" (p. 33). Mais c'est sans doute dans la tradition de la philosophie chinoise et dans les arts, la peinture et la poésie qui l'expriment que l'idée d'une "saveur du temps" est le plus remarquable, à travers la moindre des activités de la vie quotidienne liée au rythme de la nature.

Pour les Anciens Chinois, comme l'exprime Claude Larre, dans l'ouvrage précité, "avant qu'on ne puisse parler de Temps, c'était l'Indistinction. Quand, au sein du Chaos initial, il n'y avait pas encore de Commencement, il n'y avait pas non plus de Temps.Temps et Commencement commencent en même temps et finissent en même temps : quand un être disparaît, ce qu'il était retourne à l'Indistinct, il finit et son temps finit avec lui " (p. 49). Mais, au-dessus du Temps, il y a le Tao sans commencement ni fin, dont tout provient et où tout retourne. De son côté Marie-Louise Von Franz constate que "la notion de temps aztèque est fortement contrastée, pour ne pas dire abrupte ; à tel moment, ce sont l'est et les forces positives qui dominent, à tel autre, le nord et la morosité ; aujourd'hui nous est favorable, mais on ne sait pas ce que le lendemain nous réserve".

La compréhension actuelle de la complexité de la notion de Temps nous invite à un relativisme culturel et à une réforme des modes et styles de vie qu'exprime nécessairement tout rapport au temps. Compte tenu de ce qui précède, il faut prendre très au sérieux l'existentialité fondamentale de tout instant vécu d'une manière bouleversante. Le flash existentiel plonge au coeur de cette interrogation sur le Temps par la tangente qu'il crée entre l'instant et l'éternité, le moment et ce que d'aucuns appelleront le divin.

On trouve chez le fondateur des derviches tourneurs, Djalàl-ud-Dîn Rûmî, ce contemporain de Saint-Louis, l'idée de l' "immédiateté" dans la connaissance mystique. Il s'agit d'une "intuition de certitude", vision comportant, seule, une certitude subjective absolue, ne laissant aucune place à une quelconque interprétation. Cette intuition mystique s'ouvre comme un "aperçu". Elle est "saisie fulgurante", un "allumage de la connaissance au moyen d'une image spirituelle qui y flambe", "qui s'avive en flambant dans le subliminal" ; dans une telle "expérience immédiate", le sentiment du temps est aboli. Cette instantanéité existentielle s'accompagne d'un sentiment de "présence" trancendantale d'une jouissance extrême. "Plus profondément encore - écrit Eva Meyerovitch - il (Rûmî) définit la présence comme "présence à soi-même" - et l'on peut évoquer ici la co-naissance de Claudel, aussi bien que la définition par Al Hallâj de la Sagesse ésotérique : "La Sagesse (ma'rifat), c'est l'introduction graduelle de la conscience intime (Sirr) parmi les catégories de la pensée", c'est-à-dire, "la présentation du "subconscient" dans le domaine de la réflexion" . Plus encore cette instantanéité perceptive et intuitive révèle soudainement le sens exact possédé par chaque catégorie de perception. Il s'agit bien de l'ouverture de l' "oeil intérieur" qui est l' "oeil du coeur" : devenir tout entier regard par une sorte de transmutation spirituelle qui conduit à l'unité de la psyché.

Lire la suite sur Le Journal des Chercheurs, de René Barbier.

jeudi 25 novembre 2010

• La loi de l'impermanence... selon Calvin !

(Cliquer sur l'image pour un meilleur rendu) 

mercredi 24 novembre 2010

• Danse de la réalité - Dominique


S'éveiller, c'est laisser tomber toute idée de l'éveil 
et voir que personne ne peut s'éveiller.

Vu sur l'admirable blog de Dominique :


que je vous invite à découvrir.

Ce blog est destiné à présenter une approche non duelle de la danse, libre de toute école ou technique et explorer le chemin du mouvement jaillissant de sa propre source.

Je ne danse pas, je suis immobile en moi-même comme le vent est immobile en lui-même,
Ma présence n'est pas la mienne et elle parle à votre présence qui n'est pas la vôtre,
Ma présence est l'absence de ma personne et cela, personne ne peut le voir,

En quoi cela concerne la danse ? En rien, car cela est DANSE,
Quand plus personne n'est là pour danser,
Si mystère il y a, il est ici dévoilé,

C'est la danse qui se danse,
C'est la vie qui se vit,
C'est le silence qui se tait,
C'est l'amour qui jaillit,

Il n'est pas d'avant, il n'est pas d'après,
C'est l'amour qui tombe amoureux,
C'est la danse qui jaillit,

Ainsi, naît l'art de la danse,
De sa propre source qui n'a ni forme, ni fond,
Une pure absence qui enfante une présence,

Présence joyau de la réalité,
Elle ne peut qu'être célébration,
L'illusion d'être une personne est tombée d'elle-même et cet événement n'a pas eu lieu,
Voilà la guérison.


Dominique

mardi 23 novembre 2010

• Verticalité - Charles Antoni


Fidèle à lui-même, Charles Antoni a gardé tout au long de sa vie, les options fondamentales qui valent objectifs indéfectibles : le socle n’a pas changé depuis ses premiers engagements et ses premiers voyages. Toujours revenir à ce qu’il appelle la “ Verticalité ”.

Directeur des éditions L’Originel, Charles Antoni est l’auteur de nombreux ouvrages philosophiques.


Un court extrait de l'ouvrage :


Diana chasseresse de l’Indicible


Une fois qu’on sait ce qu’est le temporaire
et ce qu’est l’état d’origine,
on n’a plus besoin de rien.

Sri Nisargadatta Maharaj

Je la rencontrai pour la première fois lors de mon premier voyage en Inde, en 1969. Elle vivait dans la région du Tamil Nadu. Notre contact ne cessa jamais. Chaque fois que je me rendais dans ce vaste pays, j’allais lui rendre visite. Sur ses conseils, je pus rencontrer de nombreux yogis ou sages.

Tel Sawmi Poonja, chez qui je séjournai quelques temps dans sa maison familiale de Lucknow. Tous les jours, dans une petite pièce située au premier étage de sa demeure, nous passions ensemble des heures assis en méditation. Un jour, de manière abrupte, il posa une question, sorte de Koan : « How the consciousness works ? » (Comment la conscience travaille-t-elle ?). Je lui répondis et aussitôt il ajouta : « My work is finished with you. » (Mon travail est terminé avec vous.). Le lendemain matin, je préparai mes affaires, et pris le train en direction de Bénarès.

Tel ce yogi dans la jungle, au physique très beau, assis sur sa peau de panthère, pas très loin de l’ashram de Ramana Maharshi, où je m’étais installé, à Tiruvannamalaï, et qui s’enfermait pendant des mois dans une cave sous terre avec juste une lucarne de quelques centimètres, sans aucune nourriture. Que pouvait-il bien faire ? J’avais passé avec lui quelques journées. Il m’avait dit que je pouvais venir le voir chaque jour mais que la nuit il m’était impossible de rester, du fait que des cobras venaient lui rendre visite.
Pour moi ce pouvait être dangereux. Lorsque je lui avais demandé s’il lui était possible de m’initier, il m’avait donné certaines règles à suivre pendant six mois. Si j’avais pu les suivre pendant ce temps, il était prêt à m’enseigner. Je m’abstiens de dire en quoi consistaient ces règles, mais pour un Occidental, elles étaient quasi impossibles à appliquer.

Diana me fit également rencontrer un sage du nom de Pondiji, qui vivait dans un village du sud de l’Inde, et qu’elle considérait comme l’un des très grands. Personnage des plus étranges, qui restait presque toujours assis, ne s’adossant au mur de sa petite cabane que pour dormir.
Auprès de lui s’amoncelait un tas d’ordures : les offrandes de ses nombreux visiteurs. Il ne permettait jamais que l’on y touchât. Une fois par mois seulement, son serviteur pouvait les ôter. En fait, c’était une manière de prendre le karma des gens. Bien qu’il ne fumât pas, je lui avais offert une cigarette, et il s’était mis à tirer dessus comme un fou en me regardant de travers avec des yeux exorbités. En l’espace d’une ou deux minutes, la cigarette avait été totalement consumée. Personnage étrange que seule l’Inde pouvait enfanter. Que fit-il pour moi ? Le saurai-je un jour ?


À paraître prochainement : 



Mal d’ego, Bonheur d’être
de François Malespine


Il est un éveil ordinaire dont on ne parle presque jamais si ce n’est dans le bouddhisme tibétain où il est nommé « Rigpa », et dans le bouddhisme zen où il est nommé « Petit satori ».


S’il n’est pas l’Eveil avec un grand E, il est cependant particulièrement précieux car il nous fait passer de la croyance à la vision.
Il est comme ces dessins faits de points proposées aux enfants. Invisible au commencement, tellement évident et simple ensuite.


Date de parution : janvier 2011
Éditions Charles Antoni - l'Originel

vendredi 12 novembre 2010

• L’introspection qui dirige la lumière vers l’intérieur - Dogen


La Voie est foncièrement parfaite. Elle emplit tout. Comment pourrait-elle découler de la pratique et de la réalisation ? Le véhicule du dharma est libre et ne souffre d’aucune entrave. En quoi l’effort de l’homme réfléchi est-il nécessaire ? En vérité, le Grand Corps est au-delà de toutes poussières du monde. Peut-on encore supposer qu’il existe un moyen de l’épousseter ? Il n’est pas singulier, il est exactement là où se trouve. A quoi bon errer ?

Cependant, s’il y a un fossé, si petit soit-il, la voie reste aussi lointaine que le ciel de la terre. Si l’on manifeste la moindre prédilection ou la moindre aversion, l’esprit se perd dans la confusion. Imaginez une personne qui se loue de comprendre et qui s’illusionne sur son éveil - devinant la sagesse en toutes choses - se joint à la voie, clarifie son esprit et fait naître le désir d’escalader le ciel par ses propres moyens. Cette personne a entrepris l’exploration originelle, mais elle s’est restreinte par des limitations. Ainsi, elle n’est pas totalement engagée sur la voie de la délivrance.

Ai-je besoin de parler du Bouddha, qui possédait la connaissance innée ? On perçoit encore les effets des six années passées assis en lotus dans une immobilité totale. La transmission du sceau jusqu’à nos jours a conservé la mémoire de Bodhidharma et de ses neufs années de méditation face au mur. Comment nos contemporains peuvent-ils penser être dispenser de pratiquer ?

Par conséquent, il est nécessaire d’abandonner une pratique qui ne se fonde que sur la compréhension intellectuelle et sur les concepts. Apprendre l’introspection qui dirige la lumière vers l’intérieur, pour illuminer notre vraie nature. Le corps et l’âme d’eux-mêmes s’estomperont, et notre visage originel se révélera. Si nous voulons atteindre l’éveil, il est nécessaire de pratiquer sans tarder.

.../...

Comment pense-t-on à ne pas penser C’est aller au-delà de la pensée, cela en soi est l’activité essentielle du zazen. Le zazen dont je fais mention n’est pas l’apprentissage de la méditation, mais le Dharma qui procure la paix et le bonheur, la pratique et la réalisation d’un éveil parfait. Zazen est l’expression de l’ultime réalité. Les pièges et les filets ne peuvent pas le capturer. Une fois que vous avez saisi son essence, vous êtes comparables au dragon quant il entre dans l’eau et analogue au tigre quand il s’enfonce dans la montagne. A l’instant où on pratique zazen et que l’on rejette toute distraction et laisse aller tant le mental que le physique, le vrai Dharma se manifeste.

Extraits du Fukanzazengi, de Dogen


En résonance avec La Vache Cosmique :

Regardes ce grâce à quoi tu regardes
Si tu vois cela,
Tu vois tout.


jeudi 11 novembre 2010

• Rencontre au Petit Mas avec Jean Bouchart d'Orval

9 octobre 2010


10 octobre 2010


Retrouvez en audio Jean Bouchart d'Orval : Au coeur de l’instant
Site de Jean Bouchart d'Orval : La lumière du coeur
Site du Petit Mas

mercredi 10 novembre 2010

• Sans racine et sans assise - Poonja & Chokyi Nyima Rinpoché


ENTRETIEN DE POONJA-JI 
AVEC CHOKYI NYIMA RIMPOTCHÉ

Papaji : Je suis venu vous voir parce que le moment était mûr pour que je vienne..

Rimpotché : Nous nous tournons tous vers la même direction, nous dirigeant vers la même réalisation. Nous aspirons tous au même accomplissement.

Papaji : Je ne le pense pas. [rires]

Rimpotché : Pourquoi pas ? Pourquoi pas ?

Papaji : Parce qu'il n'existe aucune direction. Pas de direction. Toute direction vous conduit au passé.

Rimpotché : Mais la non direction est la bonne direction.

Papaji : La non direction est...

Rimpotché : La bonne direction. [rires intenses]

Papaji : J'enlève toutes les directions. " Direction " signifie qu'on a un point de départ. Puis une destination. Puis un chemin. Puis une direction : nord, sud, est, ouest. Ce sont des concepts. J'enlève les concepts. " Concept " signifie passé. Passé signifie mental. Mental signifie étendue. Mental signifie direction. Par conséquent, je ne donne aucune direction au mental. Si vous lui donnez une direction il vous emmènera dans un cycle de trente-cinq millions d'années.

Rimpotché : Trente-six millions. [rires]

Papaji : Tout ce que vous revendiquez vient du mental. Cela prend naissance dans le mental. Même la revendication " je suis libre du mental " est mentale.

Rimpotché : Oui. Toute revendication vient du mental. Demander quoi que ce soit est mental. Ne rien demander est aussi mental.

Papaji : Oui : " Je suis attaché " est mental, " je suis libre " vient aussi du mental.

Rimpotché : Certainement.

Papaji : Il n'y a pas de différence entre " je suis attaché " et " je suis libre ", parce que l'attachement et la liberté sont liés l'un à l'autre. La racine est la même. Et cette racine prend naissance quelque part, mais en un lieu qui n'est pas connu. Examinons donc la racine. Examinons la source, la source où prennent naissance le concept de mental, le concept de liberté et le concept d'attachement. Regardons la racine. Si nous voyons où elle apparaît, si nous allons à la racine, il n'y aura ni attachement, ni liberté. C'est pourquoi je dis : " Vous êtes déjà libre. " Déjà libre.

Rimpotché : Dans la langue tibétaine, nous appelons ça " sans racine et sans assise ".

Papaji : N'importe quel langage est une " assise ". Ceci est au-delà du langage. Ce dont je parle est au-delà du langage.

Rimpotché : Sans employer de mots il est difficile d'indiquer le sens. Mais je suis d'accord, les mots ne sont que des étiquettes, les mots ne sont que superficiels.

Papaji : Par conséquent, si vous utilisez des mots, tout le monde s'y accrochera.

Rimpotché : Exact.

Papaji : Parce que tout le monde s'accroche aux mots, il vaut mieux ne pas en utiliser.

Rimpotché : C'est pourquoi, dans le passé, de nombreux maîtres n'employaient pas de mots, mais seulement des gestes, comme désigner le ciel du doigt. Pas de mots pour désigner la vérité ultime.

Papaji : Oui, un mot est semblable au doigt qui désigne la Lune. Les gens s'en tiennent au doigt et ne voient pas la Lune.

Rimpotché : Oui, c'est vrai. Le doigt n'est là que pour aider les gens à regarder vers la Lune. Mais en outre, la Lune n'est pas la Lune.

Papaji : Rejetez les deux, car ce sont tous deux des mots. Lune est un mot. Doigt est aussi un mot. Alors, d'où ces mots viennent-ils ? N'importe quel mot. D'où viennent tous les mots ?

Rimpotché : Le mot est produit par la pensée.

Papaji : Achcha. Pensée et mental, pas de différence.

Rimpotché : La pensée est un fonctionnement du mental.

Papaji : Bien. Alors la pensée ne fonctionnera que quand le " je " sera présent. Il n'y a pas de différence entre le " je ", la pensée, le mental, l'étendue, le passé. Quand le " je " prend naissance, tout prend naissance, le monde, le samsara, l'attachement, la liberté. La cause première de tout ceci est le " je ". " Je suis attaché ", " je veux être libre ", " je cherche un maître pour la liberté ", et finalement, " je suis libre ". Dans chaque cas, " je " est toujours présent. " je " est le mental même. Comment alors enlever le " je " ?

Rimpotché : La connaissance qui ne voit pas de " je ", qui réalise l'état sans ego, est appelée prajna. Cette connaissance, cette prajna, qui ne voit pas de " je ", est le remède au " je ", au maintien de la notion " je ". Le " je ", ou l'ego, est la racine du samsara. Lorsqu'on s'accroche à l'idée " je ", " moi et cela " apparaissent, la dualité apparaît. Les ennuis, les plaisirs, le karma et la souffrance existent en raison de ce " je ". Donc la connaissance, ou prajna, qui réalise qu'il n'y a pas de " je ", est le remède à tout. En bref, la libération et l'illumination sont atteintes par la connaissance qui voit le non soi. Et ce que vous venez de dire est parfaitement vrai. Cette connaissance est au-delà de la pensée, au-delà du mental.

C'est la nature qui est libre du sujet et de l'objet de méditation. Et dans cette connaissance qui ne voit pas de " je ", vous ne pouvez pas utiliser le mot " méditer ", parce qu'il n'existe pas d'acte de méditer sur quelque chose. Pourquoi ? Parce qu'elle est la vérité innée, nommée également quiddité, tathata. Elle est présente en tous. Alors la méthode d'éveil à l'illumination est d'amener dans notre vécu cette nature qui est déjà présente. Elle est en elle-même la nature de toutes choses.

Cela ne fait pas de différence qu'un être éveillé vienne au monde ou non, qu'il enseigne ou non. La nature de tous les êtres est exactement la même. Comme vous l'avez dit : " Cette nature est au-delà de la pensée. " Alors, à quoi ressemble-t-elle ? Comme elle est au-delà de la pensée, on ne peut trouver de mots pour la décrire réellement.

Papaji : Je vais vous le dire. [rires] Sa Sainteté parle de connaissance. En premier lieu, la connaissance signifie le connaissant, la connaissance et le connu. Connaissant, connu, connaissance. A présent, qui est le connaissant ? Le connaissant doit être là pour acquérir la connaissance, et quelle que soit la connaissance, elle doit provenir du passé.

Rimpotché : Il existe deux sortes de connaissance : le savoir habituel qui comprend le connaissant, le connu, l'acte de connaissance.

Papaji : Oui.

Rimpotché : Mais il existe également la connaissance transcendante, nommée prajna paramita qui va au-delà de la dualité.

Papaji : Vous dites : " Il existe deux sortes de connaissance. "

Le traducteur : Exact.

Papaji : Donc [séparant deux verres de jus de fruit devant lui] cette connaissance-ci est d'une sorte [désignant un des verres] et cette connaissance-la [désignant l'autre verre] est d'une autre sorte. A présent, ceci est un et ceci est deux. Partout où il y a " deux " il y a fausseté. Le concept de " un " et le concept de " deux " appartiennent tous deux au passé. A présent, vous dites qu'il existe deux sortes de connaissance. Enlevez l'une [il enlève l'un des verres]. Enlevez l'autre [il enlève l'autre]. Maintenant il ne reste rien. On peut être " un " uniquement en relation avec " deux ". Donc un est également un concept. Si les deux sont enlevés, il n'y a rien. Les deux concepts un et deux sont partis.

Rimpotché : C'est vrai. Tout est ainsi. Un concept dépend toujours d'un autre.

Papaji : Laissez-moi aller plus loin. Je parle de la vacuité. Quand ‘ceci' et ‘cela' sont tous deux partis, il y a vacuité. En ce lieu, le " je " est terminé. Pour qu'une connaissance se présente, le " je " doit prendre naissance, mais il n'existe pas de " je " dans ce vide. Ne donnez aucun nom aux diverses sortes de connaissances parce que ces connaissances sont ignorance.

Rimpotché : Ce que vous dites est vrai. Mais nous n'utilisons le terme prajna, connaissance suprême, que lorsqu'il n'y a ni connaissant ni connu.

Papaji : Correct. Cela se nomme prajna. Prajna signifie au-delà, au-delà du mental.

Le traducteur : Le mot que Rimpotché utilise est le...

Papaji : C'est " prajna ". Au-delà de la connaissance. Mais cet " au-delà de la connaissance " n'est pas un mot. Ne vous raccrochez même pas à ce mot prajna. Prajna n'est pas un mot, pas un concept.

Rimpotché : Le temps n'est aussi qu'un concept.

Papaji : Je suis d'accord. Le temps est un concept et le temps est mental.

Rimpotché : Alors il n'existe pas d'aller...

Papaji : Et pas de venue. Alors ce samsara...

Rimpotché : Quand il n'y a pas d'aller, il ne peut certainement pas y avoir de venue. Définitivement, pas d'aller et pas de venue.

Papaji : Il n'y a jamais eu de venue. Jamais.

Rimpotché : Mais vous êtes venu. [rires] Vous êtes venu ici.

Papaji : Je vais vous dire pourquoi. Vous m'avez amené ici. [rires] Je vais expliquer : " Vous venez, je viens. " Ceci est le samsara.

Après l'éveil, le Bouddha resta tranquille. Assis sous l'arbre de la Bodhi il se tint tranquille. Après la réalisation de la sagesse, l'illumination, il resta silencieux.

Le traducteur : Pendant sept semaines.

Papaji : Puis Ananda lui demanda : " Monsieur, que vivez-vous ? " Le Bouddha ne répondit pas. Il continua simplement à rester tranquille. Qu'est-ce que cela signifie ?

Il vécut son illumination dans sa vingt-neuvième année. Puis, jusqu'à l'âge de quatre-vingts ans, il parla de l'éveil. Ses paroles venaient du non mental, de la non pensée. Elles venaient de prajna. Croyez-vous que ce discours venait de la pensée ? Non, il venait du non-mental.

Tout le monde ne peut pas parler à partir du non mental. Les gens ordinaires utilisent leur mental pour parler. Pour parler à partir du non mental, on doit avoir la connaissance que l'on est déjà éveillé. Si l'on a le sentiment que l'éveil est quelque chose qui a été gagné, alors il sera perdu plus tard, car tout ce qui est gagné sera perdu. S'il n'était pas là auparavant, ou s'il est nouvellement acquis, il sera un jour perdu.

Avec la connaissance que vous n'avez rien gagné et que vous n'allez rien gagner de plus, vous êtes conscient que rien n'a jamais existé. Ceci est la vérité ultime : rien n'a jamais existé.

Rimpotché : La vérité ultime vaut-elle quelque chose ?

Papaji : Comment ?

Rimpotché : A quoi sert la vérité ultime ? Quel est l'usage de la vérité ultime ? Y a-t-il quelques qualités en elle ?

Papaji : Elle est totale vérité. Totale vérité. Et maintenant la vérité demande à la vérité : " A quoi ceci sert-il ? " Il n'existe rien d'autre que la vérité. Et elle se révèle elle-même à une personne sainte. La vérité elle-même se révèle elle-même à une personne sainte.

Rimpotché : C'est juste. Mais reconnaîtrez-vous que la vérité ultime possède la sagesse, la compassion et la capacité d'aider les autres ?

Papaji : Oui, oui, oui.

Rimpotché : Alors ne sont-elles pas les qualités de la vérité ultime ?

Papaji : La vérité ultime inclut la compassion, mais ce n'est pas la compassion pour quelqu'un d'autre. La véritable compassion ne reconnaît personne d'autre.

Il y a des vagues dans l'océan. Chaque vague a une certaine forme - une longueur, une largeur et une hauteur - et se déplace dans une direction particulière. Mais sont-elles séparées de l'océan ? Une vague pourrait se sentir séparée et se mettre à la recherche de l'océan, mais est-elle jamais séparée ?

Rimpotché : Je ne comprends pas. Comment peut-il y avoir compassion, si ce n'est pour les autres ?

Papaji : Je vais vous parler de la compassion. La compassion et la vérité sont une et même chose. Si ma main prend de la nour-riture dans l'assiette et la porte à ma bouche, je ne dirai pas : " Ma chère main, merci beaucoup, vous avez porté de la nourriture à ma bouche. " [rires] Qui montre de la compassion à qui ? Tout le samsara est un. Tout le samsara est un.

Bouddha était compassion. Il était la compassion même. Elle oubliait tout. Elle ne connaissait rien d'autre qu'elle-même. Elle oubliait tout.

Vous connaissez sûrement l'histoire du marchand de diamants dont le fils suivit le Bouddha. Son fils unique devint moine et suivit le Bouddha. Quand le Bouddha traversa la ville d'où venait cet homme, le marchant de diamants se plaça devant lui et se mit à l'injurier. Il continua à l'injurier pendant six heures. Le Bouddha, qui était la compassion même, lui sourit pendant tout ce temps. Il souriait, c'est tout . [rires] Quand la provision d'injures fut épuisée, le Bouddha dit : " A mon tour maintenant. " Et il continua à lui sourire.

Le marchant de diamants retourna à sa boutique, jeta ses diamants dans la rue, ferma la porte, incendia la boutique et suivit le Bouddha.

Cela se nomme compassion. La véritable compassion brûle les racines de l'ego. Quand on est confronté à la compassion véritable, la souffrance cesse à jamais.

Ce mot " compassion " a été récemment adopté par les missionnaires chrétiens, mais ce qu'ils font ne relève pas de la compassion véritable. Ils essaient d'aider " les autres ".

Rimpotché : Oui. La compassion qui inclut le concept " autres " est victime d'illusions, erronée. Mais il existe également une compassion sans dualité, qui ne prend pas naissance à partir de concepts erronés.

Papaji : C'est cela dont je parle, de cette compassion qui n'est pas en relation avec le mental, avec l'ego.

Rimpotché : Avoir de la " compassion avec des concepts " vaut mieux que d'avoir des sentiments de colère ou de haine. Mais je conviens que comparée à la compassion non duelle, la compassion normale avec des concepts n'est pas pure, pas sûre. La compassion non conceptuelle n'est présente qu'avec la réalisation de la vacuité.

Très bien ! Nous sommes en accord sur tout ! [rires]

Papaji : Je n'ai pas de place pour le désaccord. Je n'ai pas de place pour le désaccord.

Le traducteur : Rimpotché dit qu'il est heureux de vous avoir rencontré et de vous avoir parlé.

Papaji : Merci beaucoup. Je suis très reconnaissant. Je suis heureux de voir le travail que vous faites. Je suis heureux de voir que vous répandez un message de paix. J'ai vu de nombreux groupes bouddhistes aux Etats-Unis. On a actuellement besoin de l'enseignement du Bouddha. Le monde est en train de se détruire par le chaos. Il y a des conflits partout. Nous devrions faire comme Ashoka a fait en son temps : répandre le message de paix. Nous avons besoin de beaucoup de gens comme Mahendra, Mitra et Bodhidharma, des gens qui répandront le message de paix du Bouddha aux quatre coins de la planète. C'est également mon objectif. Nous pouvons tous travailler là-dessus.

Les enfants qui viennent me voir [rires des personnes présentes tandis qu'il les désigne d'un geste] sont des am-bassadeurs. Quand ils retourneront dans leur pays, ils répandront le message de paix. Il sont les propagateurs du dharma.

Le Bouddha fut mon premier Guru.

[A ce moment, Papaji se mit à raconter de nombreuses histoires concernant son enfance. Elles ont déjà été présentées au premier chapitre de ce livre. Il insista tout particulièrement sur la forte attirance qu'il ressentait envers le Bouddha lorsqu'il était adolescent.]

Rimpotché : Vous avez fait cela alors que vous étiez très jeune [se référant à l'époque où Papaji s'habilla en moine bouddhiste et sortit mendier], ce qui révèle un bon karma d'une vie passée. Vous avez une forte empreinte d'une vie passée. C'est une preuve que vous avez pratiqué la méditation bouddhiste lors de vies passées. [rires]

Papaji : [Papaji rapporta alors plusieurs autres histoires qui figurent également au premier chapitre, y compris celle dans laquelle il vit toutes ses vies écoulées alors qu'il était assis sur une berge du Gange. Il dit ensuite avoir lu dans le Mahayana sutra un exposé précisant que le Bouddha avait vécu une expérience similaire].

J'ai vu toutes mes vies, depuis le ver jusqu'à ma vie précédente. J'ai vu de nombreuses vies humaines et de nombreuses autres vies. Et je les ai toutes vues en une fraction de seconde. Tout ce cycle de naissance et de mort qui semble prendre des millions d'années, n'est, en réalité, qu'une fraction de seconde. On saura, à l'instant de l'éveil, que ceci est vrai. Toutes les peines, toutes les souffrances, tous les cycles, tous les concepts de cycles naissent et disparaissent dans cette fraction de seconde. Si vous ne touchez pas le mental pendant cette fraction de seconde, vous en aurez la connaissance directe.

Méditez simplement. Soyez sans pensée pendant une fraction de seconde et vous connaîtrez qui vous êtes vraiment. Merci. Buddham saranam gacchami. [Je prends refuge en Bouddha.] Merci.

Le traducteur : C'est le vœu de Rimpotché de vous rencontrer à nouveau à l'avenir. [Rimpotché plaça alors une écharpe de prière autour du cou de Papaji].

Rimpotché : Très bien, très bien. [rires]

Source : l'excellent site InnerQiuest (retrouvez-y d'autres interview).