dimanche 31 août 2008

• Une clarté merveilleuse pleine de félicité - Houang-po

Une clarté merveilleuse pleine de félicité

Houang-po

Le fondement de la méthode, c'est son absence ;
Cette méthode sans méthode est encore une méthode.
Voilà qu'on me confie l'absence de méthode :
De toutes les méthodes, laquelle est la méthode ?

(…) Tous les Bouddhas et tous les êtres vivants ne sont qu'un seul esprit. Depuis des temps sans commencement, cet esprit, jamais venu à l'existence, n'a jamais cessé d'exister... illimité et insondable, on dirait l'espace vide.
Il n'est rien dans notre fondamentale bouddhéité, si ce n'est un vide ouvert et paisible, une clarté merveilleuse et pleine de félicité, où la réalisation profonde et spontanée plonge directement. Tout est là, parfaitement complet, plus rien ne fait défaut. Pratiquerait-on courageusement pendant trois kalpas incalculables, en passant par tous les degrés de la carrière, qu'au très bref instant de la réalisation, on ne serait le témoin d'autre chose que de sa propre bouddhéité originelle et spontanée, sans rien y ajouter. Considérez plutôt les mérites accumulés durant les kalpas comme les activités trompeuses que l'on a en rêve. C'est en ce sens que le Tathagata déclare : « Dans l'Éveil suprême, je n'ai en fait rien trouvé, car si j'avais trouvé quoi que ce soit, le Bouddha Dïpamkara n'aurait pas prédit ma venue.» Et encore : «Cette réalité, c'est l'égalité sans haut ni bas, l'Éveil. »


Voici donc notre primordialement pur esprit : il n'y est pas de différence entre les êtres vivants et les Bouddhas, les montagnes et les fleuves du monde, ce qui a forme et ce qui n'en a pas, et la totalité des univers de tous les espaces y forme une parfaite égalité, sans les caractères particuliers du « même » et de « l'autre ». Ce primordialement pur esprit est toujours en plénitude et sa luminosité éclaire toutes choses. Ne l'ayant pas réalisé, les gens du commun confondent cet esprit avec leur conscience ordinaire. Leur conscience ordinaire les obscurcit et ils n'aperçoivent pas la subtile clarté de leur être fondamental. Car quand on saute directement dans le non-esprit, l'être fondamental se manifeste de lui-même, comme la grande roue du soleil qui s'élève dans l'espace vide en illuminant tous les horizons sans rencontrer le moindre obstacle. Ainsi, l'adepte qui ne reconnaît que sa conscience ordinaire rejette cette conscience pour « passer à l'action », mais de la sorte, il se coupe immédiatement la voie d'accès à l'esprit, qu'il ne peut donc plus atteindre. Reconnaissez votre esprit fondamental uniquement dans votre conscience ordinaire, parce que, si votre esprit fondamental n'appartient pas à votre conscience ordinaire, il n'en est pas non plus séparé. Il vous suffit de ne pas théoriser sur votre conscience ordinaire, de ne pas avoir de pensées à son sujet, de ne pas non plus vous en séparer pour chercher l'esprit et de ne pas la rejeter pour vous emparer de la méthode. Rien de médiat ou d'immédiat, rien qui demeure ou s'accroche, en tous sens rien que liberté, et partout le lieu même de la Voie.

Quand les gens ordinaires entendent parler de la méthode de transmission de l'esprit de tous les Bouddhas, ils affirment qu'il y a en plus de cet esprit une méthode que l'on peut attester, saisir. Ils partent alors avec leur esprit à la recherche de cette méthode, en ignorant que cet esprit est la méthode et que la méthode, c'est l'esprit. On ne peut pas avec l'esprit chercher un autre esprit. Essaierait-on pendant des milliers et des milliers de kalpas qu'on ne trouverait, en fin de compte, rien. Mieux vaut accéder sur le champ au non-esprit, car telle est la méthode fondamentale. C'est comme ce brave qui a perdu la perle de son front. Il la cherche ailleurs, dans toutes les directions, sans jamais la trouver. Qu'un sage la lui montre et immédiatement il voit par lui même que sa perle est là, entre ses sourcils, où elle a toujours été. Les adeptes donc ont perdu leur esprit fondamental, ils n'y reconnaissent pas le Bouddha, qu'ils cherchent ailleurs, ils se livrent à des pratiques méritoires et, suivant la voie du témoignage progressif, ils poursuivent des kalpas durant leur quête acharnée et jamais ne parviennent au terme de la Voie. Ils feraient mieux d'accéder directement au non-esprit ! Quand on sait avec certitude que rien n'a, au fond, d'existence qu'on ne peut rien trouver et qu'on a alors rien sur quoi s'appuyer, se fixer, qu'il n'y a pas de sujet ni d'objet, plus aucune pensée erronée ne s'agite et l'on atteste l'Éveil. Lorsque vient le moment de témoigner de la Voie, c'est seulement de son propre esprit-Bouddha fondamental qu'on témoigne. Des kalpas de mérites ne sont que vaines pratiques. Quand le brave retrouve sa perle, ce qu'il trouve n'est autre que la perle qu'il avait déjà au front et non le fruit d'une ardente recherche tournée vers le dehors. Par conséquent, le Bouddha dit : « Dans l'Éveil suprême, je n'ai en fait rien trouvé. » Mais, craignant qu'on n'ait pas confiance en lui, il parla de ce que voient les cinq yeux et de ce que disent les cinq discours : la réalité n'est pas un simple vide. Telle est la vérité absolue. (…)

Entretiens - Houang-po
Maître Tch’an du IXe siècle

Editions du Seuil - Points Sagesse

Une variante de traduction...
Et une autre...

mardi 26 août 2008

• La contemplation dans le Dzogchen - Tenzin Wangyal


Nyamshag, la contemplation dans le Dzogchen


Tenzin Wangyal

Voici des instructions sur la détente dans la présence : quel que soit le moment où surgissent les apparences, et quelle que soit leur manière de surgir, nous devrions sans aucune correction ni modification les considérer comme de simples ornements ou embellissements de l'état primordial lui-même (la réelle condition d'existence). Dans cet état, notre pure présence intérieure se trouve non corrigée, claire, vive et nue.

Namkhai Norbu

Dans le Dzogchen, le terme "Nyamshag" (la contemplation) a un sens très précis : "la présence dans l'état d'inséparabilité de la clarté et de la vacuité". (...) Dans le cadre du Dzogchen, la méditation sur la vacuité du chemin des Sûtras et les pratiques de la voie tantrique, comme la récitation de mantras et la visualisation de déités appliquées pour obtenir l'unification de la vacuité et de la béatitude, sont des pratiques secondaires utilisées lorsqu'elles sont nécessaires. Ce que nous devons développer en tant que pratiquant du Dzogchen, c'est la contemplation de l'inséparabilité de la vacuité et de la clarté dans l'état naturel de l'esprit. Comme ils sont déjà inséparables, dans le Dzogchen, nous n'essayons pas de les unir comme le font les pratiquants des tantras, mais nous reconnaissons simplement leur indivisibilité. Les pratiques secondaires ne sont que des moyens habiles appliqués à ce développement.
(...) Dans la pratique de concentration, un dualisme subsiste entre le sujet qui se concentre (fixant son objet) et l'objet de concentration (l'objet fixé), ainsi qu'entre l'intérieur (la conscience au sein du corps et de l'esprit du pratiquant) et l'extérieur (l'objet utilisé par la méditation). Mais dans la contemplation (Dzogchen), il n'y a ni sujet ni objet : c'est comme "verser l'eau dans de l'eau" (...), il n'y a plus là d'existence relative, la perception est directe, c'est celles des yogi. (...) Il suffit simplement de demeurer dans l'état de contemplation où intérieur et extérieur n'existent plus, lorsque s'élève la reconnaissance que toute réalité "extérieure" est une projection de l'état "intérieur".
(...) La façon de comprendre est directe et la manière de demeurer dans l'état de contemplation est sans distinction, entre connaisseur et connu, sujet et objet. Cet esprit, qui, au-delà de tout esprit conceptuel, appréhende l'état naturel primordial est un esprit interne subtil, connu également sous le nom de "claire lumière" (claire désigne vacuité et lumière désigne la clarté de l'état primordial).
(...) La relation que nous entretenons avec l'émergence des pensées est l'un des points cruciaux de la contemplation [Dzogchen]. En observant comment les pensées s'élèvent, demeurent et se dissolvent dans la vacuité, nous percevons leur nature véritable, vide : les pensées sont le mouvement de l'esprit et sont de même nature que l'esprit naturel, tout comme les vagues sont de la même nature que la mer. Lorsque les pensées surgissent dans l'état de contemplation, nous sommes conscients qu'elles s'élèvent de la vacuité et que leur essence à la nature de la vacuité. Elle ne nous dérangent plus et nous les laissons partir, restant dans l'équanimité de la contemplation. De cette façon, l'état naturel de la vacuité nous apparaît plus clairement quand dans notre expérience nous nous trouvons directement au contact de l'union et de l'identité de la clarté, Rigpa, et de la vacuité, Künshi, réalisant alors que la clarté et la vacuité sont inséparables au sein de l'état naturel.
(...) Il ne s'agit pas d'un état aveugle dont les pensées seraient absentes. En fait, si l'état de calme sans pesnées que nous avons cultivé est prolongé au-delà de l'espace naturel qui existe entre deux pensées, on atteint un état d'ignorance et non de présence car, dans l'absence forcée de pensées, il n'y a que vacuité sans clarté, relaxation sans présence. Dans l'état véritable de contemplation, nous ne créons ni ne bloquons les pensées, mais, sans distraction, demeurons présents à tous les instants d'esprit, que des pensées y soient présentes ou non."


Tenzin Wangyal, Les prodiges de l'esprit naturel, Le Seuil/Point Sagesse

lundi 25 août 2008

• Vous êtes la Conscience à chaque instant - Francis Lucille

Vous êtes la Conscience à chaque instant

Francis Lucille

Question : Que signifie abandonner l’esprit, le corps et le monde, d’instant en instant, à la présence silencieuse dans laquelle ils apparaissent ? Comment pratique-t-on cela ?

Francis Lucille : Abandonnez celui qui fait. Abandonnez celui qui agit, celui qui désire, celui qui a peur. Celui-ci n’est qu’une apparence. Celui-ci est fait de pensées et de sensations. Quand celui-ci devient silencieux, le monde, le corps, et l’esprit s’abandonnent au silence.

Il n’y a rien d’autre à faire. C’est seulement lorsqu’il vous semble ne pas être dans un état d’éveil, et qu’il vous semble que quelque chose doit être fait pour y être, que vous avez apparemment perdu votre nature véritable. Vous êtes la Conscience à chaque instant. Le seul moment où vous croyez ne pas l’être, c’est lorsque l’acteur, celui qui désire, surgit. Il se manifeste comme une pensée, une sensation corporelle, une résistance, un « je ne veux pas cette sensation » ou « ce n’est pas ainsi que les choses devraient être ».

Le plus grand obstacle sur le chemin est croire que l’état naturel est nécessairement un état de plaisir. Une telle croyance conduit immédiatement à rejeter tout ce qui est qualifié de désagréable et génère l’impression de chuter hors de notre état d’éveil. Abandonner le monde signifie que le plaisant ne nous attire plus et que nous ne sentons aucune répulsion à l’égard du déplaisant.

Cela est plus facile dans les situations tranquilles. Dans ces moments-là, la grâce rend toute chose aisée. Rien ne nous attire ou ne nous repousse. Le monde est abandonné. Le chant des oiseaux, le bruit de la circulation, les odeurs ou la température de l’air que nous respirons, quelle que soit la chose que nous vivons sur le moment, tout va et vient librement, sans déclencher la moindre réaction, sans créer aucune vague. Cela nous enseigne ce à quoi ressemble l’état d’illumination. La seule chose que nous ayons à faire est de transposer cette façon naturelle de vivre le monde, dans le domaine des pensées et des sensations corporelles. Il nous suffit d’accueillir les pensées et les sensations corporelles de la même façon que nous accueillons le chant des oiseaux, le bruit de la circulation ou toute autre chose dont nous faisons l’expérience. Lorsque le chant des oiseaux ou tout autre événement est présent, cela est simplement présent. Nous n’intervenons plus face à ce qui manifeste. Nous ne faisons rien pour que cela apparaisse, pour que cela se maintienne, ou pour que cela disparaisse.

Le même principe est vrai pour nos pensées et nos sensations corporelles. Il n’y a pas d’attachement. N’adhérez à rien ! Le chant des oiseaux, le bruit de la circulation, nos pensées et nos ressentis, sont comme les éléments du rêve. D’un certain point de vue, ce sont des non-événements car ils ne provoquent aucune activité en nous. Evidemment, si la situation exige une réponse, nous répondons alors de façon appropriée à partir de cette perspective non impliquée ; mais aucune trace ne subsiste après la réponse qui pourrait susciter de nouvelles pensées ou de nouveaux ressentis. Nous revenons à l’ouverture, prêt à accueillir la prochaine manifestation, quelle qu’elle puisse être.

Informations :

Brigitte CHATONEY Tel : (33) -0-1 42 27 33 72 le soir
Email : brigitte.chatoney@free.fr

Pour les retraites, merci de réserver soit par Email,
soit par courrier au : 6, Square Gabriel Fauré – 75017 - Paris

Web Site de Francis Lucille : www.francislucille.com

dimanche 24 août 2008

• Le moi-présence impersonnel - Daniel Morin

Le moi-présence impersonnel

Daniel Morin




Le Tout est immobile



La vie est toujours complète là où je suis



Vu sur les sites Phytospiritualité et Chronophonix

vendredi 22 août 2008

• Le grand paradoxe et la pure subjectivité - David Ciussi

Le grand paradoxe et la pure subjectivité

Extraits d'une conférence de David Ciussi





L'esprit de la source


jeudi 21 août 2008

• Qui suis-je ? - Eckhart Tolle

Qui suis-je ?

Eckhart Tolle

Vous vous asseyez et vous demandez : "qui suis-je ?".
Vous n'êtes pas supposé répondre à cette question.

Vous laissez un blanc après la question.

Dans ce blanc, dans cet espace vide,
si cette pratique fonctionne comme elle devrait,

vous expérimentez soudainement un sentiment de Présence

qui n'a rien à voir avec votre processus de pensées.

Votre propre sentiment d'une Présence consciente.

Vous
étant...

≈≈≈≈

“Pointez simplement ‘Qui suis-je ?’ et regardez attentivement. Ne faite aucun effort ni ne générez aucune pensée. Regardez intérieurement avec une totale dévotion et restez ainsi. ”

Poonja

≈≈≈≈

Commentaires vu sur le site Les Passants :

Une des difficultées que nous rencontrons en lisant les paroles de Ramana Maharshi et de Nisargadatta est la justesse des traductions. Ce qui ne correspond pas toujours à la précision de leur pensée, dû aux subtilitées de chaque langue.

Par exemple, le "Self-Inquiry" du "Who Am I ?" (le questionnement sur "Qui-Suis-Je?").
Un américain dont j'ai déjà parlé ici, Michael James* (http://www.happinessofbeing.com) à traduit certains livres et connait bien le Tamil. Il interprète ce questionnement comme signifiant être dans le "Je SUIS", sans questions, sans effort, "être conscient d'être conscient". Alors que plusieurs l'appliquaient textuellement en se questionnant continuellement... Qui Suis-Je ? Qui pose cette question ? D'où provient cette question ? Etc.


Gede

* The practice of atma-vichara – 'self-enquiry' or self-scrutiny

A Sanskrit term that was often used, both by Sri Ramana and by other more ancient sages such as Sri Adi Sankara, to describe this empirical practice of self-investigation or self-attentiveness is atma-vichara, which is often loosely translated in English as 'self-enquiry' or 'self-inquiry'. However, rather than 'enquiry', the word vichara can be more accurately translated as 'investigation', 'examination' or 'scrutiny'. Therefore the term atma-vichara really means 'self-investigation', 'self-examination' or 'self-scrutiny', and denotes the simple practice of closely examining, inspecting or scrutinising our fundamental and essential consciousness of our own being, 'I am', with a keen and concentrated power of attention.

Sri Ramana also referred to this empirical practice of self-investigation, self-examination, self-inspection, self-scrutiny, self-attention or self-attentiveness as the vichara 'who am I?' However, when he described it thus, he did not mean that it is a process of questioning ourself 'who am I?' either verbally or mentally. What he intended us to understand by this term is that this practice is a keenly attentive examination or scrutiny of our basic consciousness of our own being, which we always experience as 'I am', in order to discover the true nature of this 'I', our essential being or 'am'-ness.

mercredi 20 août 2008

• L'inexistence du moi - Dzigar Kongtrül

L'inexistence du moi

Dzigar Kongtrül

Je me souviens de la première fois où j'ai réellement fait l'expérience de l'inexistence du moi. J'ai éprouvé un puissant sentiment de liberté ; j'ai reconnu la perfection fondamentale de toutes choses lorsque je ne laissais pas l'importance du moi s'immiscer dans leur déroulement et tout compliquer. Je me suis senti soulagé d'exposer en plein jour tous les efforts inutiles que j'avais jusque-là déployés pour maintenir ce moi.

Extrait de Le bonheur est entre vos mains - NiL Éditions

mardi 19 août 2008

• N'être rien - Éric Baret

N'être rien

Rencontre et entretien avec Éric Baret,
héritier du shivaïsme tantrique du Cachemire.



Visiter le site d'Éric Baret : http://www.bhairava.ws/

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Claire Varin : Et l'éveil, est-ce qu'il est commun à toutes les traditions ?

Eric Baret : Toutes les traditions ont parlé de l'humilité.

L'éveil, c'est l'humilité, c'est arrêter de prétendre être ceci ou cela, arrêter de prétendre être auteur, arrêter de prétendre diriger sa vie, se rendre compte que le courant des choses est là et se donner à ce courant sans vouloir diriger. Quand vous lisez Ib'n Ata Allâh al-Iskantari, Layman P'ang, ou la Ribhu Gita il y a ce même silence, cette même humilité qui ont présidé à l'expression. Mais il n'y a pas d'éveil personnel. Quand Eckhart finit son sermon, il dit toujours, d'une manière ou d'une autre: «Prions pour que cette vérité prenne corps en nous.» Il ne prétend jamais être dans la vérité.

L'éveil, c'est la réalisation qu'il n'y a personne qui peut s'éveiller. On est dans un moment de totale humilité. Dire «Je suis éveillé» est factice. Cela ne veut rien dire.