lundi 12 juin 2023

• Il n’y a pas d’égo à tuer - Mingyour Rinpoché


Le terme d’égo – ou de moi-égo – est souvent employé pour désigner la strate extérieure fabriquée, égocentrique, du moi, et nous évoquons fréquemment la nécessité de renoncer à l’égo, de le dissoudre ou de le transcender. J’avais moi-même considéré le fait d’ajouter du bois au feu comme un mission de suicide de l’égo. Cependant, l’usage courant du terme égo, que ce soit dans les enseignements bouddhistes ou dans son acceptation générale, en donne l’image d’une entité qui aurait une forme et une dimension, et qu’on pourrait extraire comme une dent. Ça ne se passe pas comme ça. L’égo n’est pas un objet ; c’est plutôt un processus qui s’accompagne de la propension à l’emprise et encourage à s’accrocher à des idées et à des identités fixes. Ce que nous appelons égo est en réalité une perception perpétuellement en mouvante et, bien qu’il occupe une place centrale dans notre histoire narrative, ce n’est pas une chose. Aussi ne peut-il pas réellement mourir, ni être tué, ni transcendé. Cette tendance à se cramponner se manifeste quand nous interprétons de façon erronée le flux constant de notre corps et de notre esprit et le prenons à tort pour un moi solide, immuable. Nous n’avons pas besoin de nous défaire de l’égo – ce sentiment du moi immuable, solide et malsain – pour la bonne raison qu’il n’a jamais existé. Le point à retenir est qu’il n’y a pas d’égo à tuer. Ce qui meurt, c’est la foi en un moi durable, qui ne change pas. Le terme d’égo peut tout de même apporter une référence utile ; mais il faut veiller à ne pas engager une bataille contre quelque chose qui n’existe pas. Paradoxalement, quand nous combattons l’égo, nous renforçons les illusions du moi, rendant contreproductifs nos efforts pour accéder à l’éveil.

Yongey Mingyour Rinpoché – Pour l’amour du monde.