mardi 11 janvier 2022

• Maintenant est simplement maintenant - Kodo Sawaki


Kodo Sawaki (1880-1965), surnommé Kodo sans demeure, est un moine zen qui a parcouru le Japon à pied tout au long de sa vie. Il était renommé pour ses conférences magistrales, drôles et désinvoltes. Son audience se composait aussi bien de moines, de nonnes que de geishas, de paysans, de ministres, d’artistes et de savants. Ces rendez-vous hors du commun se déroulaient dans des cadres tels que l’université Komazawa à Tokyo, ou dans des lieux improvisés à la campagne, dans des prisons, des temples... 

« Kodo Sawaki fait partie des six personnes au Japon qui ont vraiment compris le zen. » 

Shunryu Suzuki, auteur de Esprit zen, esprit neuf. 


© Extraits publiés avec l'aimable accord des Éditions L'Originel - Charles Antoni.


À toi qui te demandes si ton zazen a servi à quelque chose

À quoi sert zazen ? Absolument à rien ! Ce « ne sert à rien » doit s’enfoncer dans ta chair et tes os jusqu’à ce que tu pratiques vraiment ce qui ne sert à rien. Jusque là, ton zazen ne sert vraiment à rien.
Tu dis que tu veux t’améliorer par la pratique de zazen.


Zazen n’a rien à voir avec peaufiner sa personne.

Zazen, c’est arrêter d’être une personne.

Zazen est insatisfaisant. Insatisfaisant pour qui ?

Pour la personne ordinaire. Les gens ne sont jamais satisfaits.


Cela ne va-t-il pas de soi ? Comment ce qui est éternel et infini pourrait-il satisfaire les désirs humains ?
Insatisfaisant : simplement pratiquer zazen.
Insatisfaisant : réaliser zazen avec ce corps.
Insatisfaisant : absorber zazen dans ta chair et ton sang.


Être surveillé par zazen, maudit par zazen, coincé par zazen, trimbalé à droite et à gauche par zazen, pleurer tous les jours des larmes de sang — n’est-ce pas la forme de vie la plus heureuse que tu puisses imaginer ?


Tu dis : « Quand je fais zazen, je suis dérangé par mes pensées. »

Bêtise ! La vérité, c’est que c’est seulement en zazen que tu prends conscience d’être dérangé par tes pensées. Quand tu fais des cabrioles, tu ne te rends pas du tout compte de tes pensées dérangeantes. Si un moustique te pique pendant zazen, tu t’en rends compte sur le champ. Mais si tu es en train de danser et qu’une puce te pique les couilles, ça t’échappe complètement.


Ne gémis pas. Ne regarde pas dans le vide.

Contente-toi de t’asseoir.


≈≈≈≈≈≈≈


À toi qui fais tout ce que tu peux pour obtenir le satori


On ne pratique pas pour obtenir le satori. C’est le satori qui tire notre pratique. On pratique tirés de toutes parts par le satori.

Ce n’est pas toi qui cherches la Voie, c’est la Voie qui te cherche.

Tu fais des études, tu fais du sport, et tu fais une fixation sur le satori et l’illusion. Si bien que zazen lui-même se transforme pour toi en marathon, avec le satori à la ligne d’arrivée. Et pourtant, du simple fait que tu essayes de l’attraper, il t’échappe complètement.

C’est seulement quand tu renonces à interférer de la sorte que ta nature originelle, cosmique, s’actualise. Tu dis que tu cherches la Voie, mais à quoi cela rime-t-il si tu cherches la Voie pour ta propre satisfaction ?

Tu veux devenir Bouddha ? Pas besoin de devenir Bouddha !

Maintenant est simplement maintenant.

Tu es simplement toi. Et dis-moi, si tu veux quitter l’endroit où tu te trouves, c’est pour aller où au juste ?

Zazen veut dire simplement s’asseoir sans même penser à devenir Bouddha.

On ne parvient pas au satori à travers la pratique : la pratique est le satori. Chaque pas est le but.


Chez le même Éditeur :

Philippe Reiryu Coupey, moine et maître zen de longue date, a su tracer son chemin à travers les difficultés d’une existence hors norme : une vie en montagnes russes.

Ayant grandi parmi les gratte-ciel de son père, il a été élevé dans les prestigieux internats suisses et américains. Plus tard, il perd tout. C’est à partir de là qu’il rencontre maître Deshimaru, qu’il découvre le zen…


En parcourant ces Fragments Zen, on trouve autant matière à se réconcilier avec sa plus humble réalité, qu’à sortir grandi des épreuves de l’existence.