Plus que tout autre chose, c'est le bonheur que nous aimons, c'est le bonheur que nous désirons. Or la majorité d'entre nous le recherche dans la mauvaise direction lorsque nous nous acharnons à vouloir le trouver dans les objets, les activités, les relations, les substances ou mêmes dans des états mentaux spéciaux encouragés par certaines pratiques religieuses ou spirituelles.
Ce livre nous convie à un changement radical de direction, à savoir, détourner notre attention de l'expérience objective — qui jamais n'arrive à combler totalement notre soif de bonheur et de paix durables – pour la tourner vers soi, vers l'intérieur. C'est là que se trouve la résidence suprême du bonheur et de la plénitude, dans la simple connaissance de notre être propre, qui est pure conscience.
Ce retournement – ou retour – de l'attention ou mental vers sa source de pure conscience constitue l'essence de la méditation et de la prière.
Comment opérer ce retournement est le cœur palpitant de ce livre.
Rupert Spira nous montre que la simple connaissance de notre propre être n'exige ni pratique ni effort. En effet, qu'avons-nous à faire pour être ou connaître ce que nous sommes déjà et toujours ?
Ainsi, plutôt qu'une pratique, c'est une approche contemplative que nous propose ce livre. Ainsi, la méditation n'est pas quelque chose que l'on fait, c'est ce que l'on est. La connaissance de notre être essentiel est une non-pratique.
"Être conscient d'être conscient" consiste donc à demeurer dans et en tant que conscience.
Cette approche simple et contemplative conduit le lecteur à la reconnaissance de son être essentiel et à la paix et la plénitude qui lui sont inhérents.
© Extrait publié avec l'aimable accord des Éditions Accarias-L'Originel :
Toute expérience objective est connue. Nous sommes conscients de notre expérience. Il serait impossible d'avoir une expérience qui ne serait pas connue ou dont on ne serait pas conscient. Notre pensée du moment, un souvenir d'enfance, n'importe quels émotions ou sentiments présents, la sensation de douleur et de faim, le bruit de la circulation, la vue de ces mots ou la vue par notre fenêtre, sont tous connus ou expérimentés. Ainsi, connaître ou être conscient est présent dans toute expérience.
Que nous soyons déprimé, esseulé, triste, joyeux, paisible, amoureux, anxieux, las, jaloux, excité ou heureux, nous sommes conscients. Que nous pensions, mangions, marchions, conduisions, dansions, étudions, rêvions ou hallucinions, nous en sommes conscients. Quoi que nous pensions, ressentions, percevions ou fassions, nous en sommes conscients.
Nous sommes conscient de tout ce qui est connu ou expérimenté, quels que soient les contenus de notre connaissance ou de notre expérience.
Ainsi, connaître ou être conscient est l'élément continu dans toute connaissance et toute expérience fluctuantes. Il est constamment présent tout au long des trois états de veille, de rêve et de sommeil. Nul autre élément de l'expérience n'est continu.
En fait, être conscient n'est pas continu dans le temps : il est à jamais présent. Cependant, pour faire une concession au mental qui croit en la réalité du temps, disons, provisoirement, qu'être conscient est l'élément continu de toute expérience.
Toute expérience objective — pensées, images, sentiments, sensations et perceptions — apparaît et disparaît mais l'expérience de connaître ou d'être conscient n'apparaît ni ne disparaît jamais. Elle demeure présente tout au long de l'expérience changeante, de même qu'un écran demeure constamment présent pendant tout film.
Connaître ou être conscient imprègne intimement toute expérience sans jamais être modifié par une expérience particulière.
Les pensées, les sentiments, les sensations et les perceptions ont changé un nombre incalculable de fois au cours de notre vie mais la connaissance grâce à laquelle nous les connaissons — la simple expérience d'être conscient — demeure inchangée.
Savoir et expérience changent tout le temps. Connaître ou être conscient ne change jamais.
Le connu change toujours; connaître ne change jamais.
Connaître ou être conscient entretient à tout savoir et à toute expérience une relation comparable à celle d'un écran conscient à un film. Mais à la différence d’une télévision normale que l'on regarde assis sur un canapé, l'écran conscient du pur connaître, ou être conscient, regarde le film de l'expérience qui se joue sur lui.
Connaître ou être conscient n'est pas inaccessible, inconnu ou enfoui en nous. Il rayonne en toute clarté à l'arrière-plan de toute expérience, de même que l'on peut dire que l'écran est clairement visible à l'arrière-plan d'un film.
Toutefois, tout comme on a tendance à ignorer l'écran lorsque l'on regarde un film, pris de fascination pour l'histoire qui s'y déroule, connaître, être conscient, ou la conscience elle-même, demeure généralement inaperçu en raison de l'attention exclusive que nous portons aux objets de l'expérience.
Connaître ou être conscient ne dépend pas des conditions ou des qualités particulières de l'expérience. Il irradie indifféremment dans toute expérience, qu'elle soit plaisante ou désagréable, bonne ou mauvaise, juste ou fausse, de même qu'un écran reste indifféremment visible durant tout film, quel qu'en soit le contenu.
Connaître ou être conscient constitue l'élément essentiel et irréductible de l'expérience. Il est fondamental à toute expérience. Il est cet élément de l'expérience qu'on ne peut lui arracher.
Connaître ou être conscient n'est jamais modifié par l'expérience. Il ne bouge ni ne fluctue. Il est le seul élément stable de l'expérience.
Connaître ou être conscient constitue l'ingrédient principal de tout savoir et de toute expérience. C'est l'arrière-plan sur lequel s’inscrivent tout savoir et toute expérience.
Connaître ou être conscient est le médium sur lequel ou au sein duquel apparaît toute expérience. C'est cela-même qui permet à toute expérience d'être connue et constitue, ultimement, la substance ou la réalité dont est faite toute expérience.
C'est l'élément qui connaît dans toute connaissance; c'est cela qui fait l'expérience dans toute expérience.
De même que l'écran n'apparaît jamais sous la forme d'un objet dans un film — bien qu'il soit visible tout du long — connaître ou être conscient n'apparaît jamais sous la forme d'un objet de connaissance ou d'expérience et, pourtant, rayonne en toute clarté au sein de toute connaissance ou expérience.
Bien que le fait de connaître ou d’être conscient ne soit pas en soi une expérience objective au sens où l'est une pensée, un sentiment, une sensation ou une perception, pour autant nous sommes conscients d'être conscient. Ainsi, bien que le fait de connaître ou d'être conscient ne possède pas de qualités objectives, il est en même temps connu.
C'est dans ce contexte que je parle de l'"expérience" de connaître ou d'être conscient. Or, pour distinguer connaître ou être conscient de toute connaissance ou expérience objective, on le qualifie d'expérience non objective de connaître ou d'être conscient.
Connaître ou être conscient n'est pas en soi une expérience mais sans cela, aucune expérience ne pourrait exister. C'est cela qui rend l'expérience possible sans pour autant être en soi une expérience.
Connaître ou être conscient est non objectif, transparent ou incolore, dénué de tout objet apparent, empli de lui-même seul. Et en tant que tel, c’est une expérience totalement unique. Connaître ou être conscient ne peut être connu en tant qu'objet et pourtant n'est pas inconnu.
C'est l'élément le plus évident de l'expérience et pourtant le plus ignoré.
Il en est fait allusion, dans la tradition du Shivaïsme cachemirien, comme "le plus grand secret, mieux gardé que le plus caché des secrets, et pourtant, plus évident que la plus évidentes des choses."
Aucun préalable n'est requis pour la reconnaissance du fait de connaître ou d'être conscient. Reconnaître l'expérience de connaître ou d'être conscient ne demande pas de qualification ni de niveau d'intelligence particuliers.
Nul effort n'est nécessaire pour reconnaître l'expérience de connaître ou d'être conscient, pas plus qu'il n'en faut pour voir l'écran durant un film.
Il n'est pas nécessaire de contrôler nos pensées, de s'asseoir dans une position particulière ou de pratiquer ce que l'on appelle méditation, dans le but d'être conscient de l'expérience d'être conscient. L'expérience non objective d'être conscient est un fait de l'expérience, le plus simple, le plus intime, le plus évident qui soit.
L'expérience d'être conscient est indépendante de ce dont nous sommes conscients. Aucune expérience n'affecte l'expérience non objective d'être conscient, de même que rien de ce qui se déroule dans le film n'affecte l'écran sur lequel il se joue.
Il n'est pas nécessaire de changer ou de manipuler l'expérience de quelque manière que ce soit pour noter l'arrière-plan constitué par le fait d'être simplement conscient. Que nous soyons effrayés, frappés d’ennui, agités, déprimés, amoureux ou paisibles, l'expérience d'être conscient demeure la même dans tous les cas.
De même qu'aucun événement particulier se produisant dans un film n'a la capacité d'obscurcir l'écran, à moins que nous en lui donnions la permission, aucune expérience ne peut voiler l'expérience de connaître ou d'être conscient, à moins que nous le lui autorisions, auquel cas, elle semblera le faire. Dès que nous lui retirons cette autorisation, l'expérience de connaître ou d'être conscient devient évidente en soi.
Permettez à l'expérience d'être conscient de venir au premier plan de l'expérience, et laissez les pensées, les images, les sentiments, les sensations et les perceptions refluer à l'arrière-plan. Observez simplement l'expérience d'être conscient. Là réside la paix et le bonheur auxquels tout le monde aspire.
Soyez conscient d'être conscient.
Autre nouveauté :
L’enseignement central du bouddhisme est celui de l’éveil. En témoigne la figure du Bouddha assis, emblème de la réalisation de l’esprit. Souriant face au monde, le Bouddha exprime la profondeur de la sagesse à laquelle il a atteint ; il manifeste aussi la méthode première, qui est la méditation en posture.
Un maître de l’ancien temps a dit : « L’esprit lui-même est le bouddha. Il n’y a pas de bouddha en dehors de l’esprit. » La formule paraît simple. Mais une telle assertion, que peut-elle bien signifier ? De quelle nature est cet esprit et où se trouve-t-il ?
S‘il en est ainsi, le bouddhisme, tel qu’on se le représente communément, n’est-il pas à reconsidérer, dès lors que l’on entend en réaliser la quintessence spirituelle ? Voilà l’objet du présent ouvrage : en s’appuyant sur les paroles des anciens maîtres et sur les textes les plus pénétrants, faire retour à l’essence de la doctrine. Réaliser la nature-de-bouddha, réaliser l’esprit-bouddha, telle est l’authentique voie bouddhique. Réaliser l’esprit-bouddha, c’est justement réaliser la vacuité de l’esprit.
Il convient de ne pas confondre l’esprit-bouddha avec la conscience ordinaire, avec le mental, qui tout au contraire s’y surimpose, l’oblitère et l’obscurcit. Pour autant, si l’esprit-bouddha n’est pas la conscience ordinaire, il n’en est pas séparé. L’esprit-bouddha, dit-on, est reconnu dans la conscience ordinaire.
Ce n’est que lorsque l’esprit est entièrement nettoyé de ses croyances que surgit la grande vérité du bouddhisme dont ce livre nous donne le goût.