lundi 13 novembre 2017

• J’étais entré dans la réalité centrale de toute chose - Jurgen Ziewe


Récit dune retraite de pleine conscience dans la nature

Une puissante expérience de pleine conscience. Jurgen Ziewe a passé une semaine dans un chalet isolé d'une région sauvage d'Ecosse. A l'abri des distractions du monde moderne, il a fait l'expérience de première main de ce qui se produit lorsque l'attention est focalisée sur la source même de l'attention. 
         Ce récit  nous fait voyager dans le vécu intime de son auteur qui expose ici les aspects les plus profonds de sa vie intérieure. Il a pris note, avec autant de précision et d'authenticité que possible, des processus mentaux à l'œuvre dans ses profondes méditations. Il vécut là une de ses plus puissantes expériences d'expansion de conscience de sa vie ; une expérience qui le laisse dans un rapport nouveau et inédit au monde.
Cette proximité avec le phénomène de l'attention l'a conduit à transcender le point de vue individuel et a débouché sur une expérience de Conscience Cosmique. 
Cette aventure intime est agrémentée de photos prises par l'auteur qui nous mettent aussi en contact avec la beauté  du monde animal, prenant parfois des accents chamaniques. 
Un témoignage simple et profond. A notre époque moderne riche en  sollicitations, cette lecture fait l'effet d'un rafraîchissement et est une invitation à la simplification et à la paix.
Un livre profondément inspirant qui fournit des indices à tous ceux qui voudraient sortir du confinement des identifications personnelles.

© Extrait publié avec l'aimable accord des Éditions Accarias-L'Originel : 

Qu’importe ce que je faisais ou les pensées que je pouvais avoir, je ne pouvais me situer que dans ce seul lieu qui n’était ni ne pouvait être séparé de rien. Quel que soit l’endroit où se portait mon regard, l’endroit où mon attention était captée, tout faisait partie de moi dans la même mesure que mon corps faisait partie de moi. Il n’y avait pas de retour en arrière possible. J’étais entré dans la réalité centrale de toute chose, et j’avais levé le voile de l’illusion d’être une entité séparée d’un monde qui serait extérieur. Je ne me tenais désormais plus à part et je ne pouvais plus agir comme si j’en étais séparé. J’avais cessé de me situer dans un temps et dans un lieu, et j’étais devenu un champ sans horizon ni limite.
Ce champ n’avait ni début ni fin, et il était créé et recréé tout neuf à chaque instant. Je me sentais attiré de manière identique par tous les objets qui entraient dans ce champ quelles que soient leur valeur dans le monde. Je vis une fleur comme la fleur essentielle – et ce quel que soit son état : en graine, naissante, épanouie, fanée, retombant sur sa tige. Sa nature essentielle de fleur était toujours visible, même lorsqu’elle gisait dans la boue.

Je ne devais plus me soucier de la manière de fonctionner de ce vaste champ toujours à nouveau neuf d’unité qui déployait des milliards de milliards de formes avec des opportunités infinies de croissance et d’exploration. Je pouvais agir, parler et penser en accord avec ce qui est sans avoir à me préoccuper d’effectuer ou non ce qui est juste. Je pouvais faire fond sur l’authenticité de mes pensées – non filtrées et libres de jugements – car elles émergeaient d’une source profonde, pure et non contaminée qui connaissait et comprenait toutes les choses. Une nouvelle autorité émergeait, affirmant gentiment mais fermement son contrôle, légitimée par sa connexion directe à ce qui est vrai et authentique. Elle ne nécessitait aucune persuasion et agissait comme source de sagesse intrinsèque. Elle accomplissait simplement ce qui était nécessaire pour faire évoluer sa propre nature sans avoir besoin de poser des questions ou de chercher des réponses. La tranquillité et la claire lumière de la conscience étaient tout autour de moi et j’y avais un accès direct.

Il n’y avait plus ni bien ni mal, juste l’essence impartiale de toutes choses. Je n’avais plus besoin de séparer les choses les unes des autres pour les hiérarchiser dans un système de valeurs et de décider quelles étaient les bonnes et quelles étaient les meilleures, celles qui avaient de la valeur et celles qui n’en avaient pas. J’acceptais tout simplement les rôles, les attributions et les fonctions dans le monde comme une part intrinsèque de son existence. Partout où mon regard se portait, je ne voyais qu’existence en développement, manifestation légitime enracinée dans un être et présente dans un but précis qui avait sa place dans le monde pour évoluer, apprendre et se déployer.

Cela durerait-il ou n’était-ce qu’une provisoire demeure, une échappée temporaire des fers de la condition des êtres mortels ? Une telle réalisation peut-elle se maintenir ? Est-il possible de survivre dans un monde privé de ses valeurs traditionnelles et du sens qu’on lui a affecté ? Comment un tel monde pourrait-il être maintenu dans un environnement humain où l’on juge tout selon les apparences ? Maintenir nécessiterait quelqu’un qui maintient, mais une telle personne avait déjà disparu avec tout le reste. Je réalisai que la maintenance prenait soin d’elle-même et que ma vie désormais serait un processus continuel de lâcher-prise et de réjouissance face au fait qu’il n’y a rien dont je ne fasse pas déjà intégralement partie.

Quelque chose s’était définitivement brisé, comme une cage de verre dépoli pulvérisée en des millions de morceaux et qui me laisserait désormais respirer l’air frais et voir le monde clairement comme si c’était la première fois. Il faudrait un miracle et un effort surhumain pour recoller tous ces petits morceaux de verre et reconstituer la cage à nouveau.

Oui, j’avais connu la tranquillité dans le passé, une bénédiction quotidienne octroyée par mon compagnon silencieux qui me rappelait à lui au moment où j’ouvrais les yeux. Où était-il donc maintenant ? Il était ici, en moi, tout à côté de moi et devant moi. Il était dans mes mains et dans mon corps et je pouvais voir le monde à travers ses yeux. En devenant son égal, j’étais devenu lui. J’étais le compagnon silencieux.

Il était dans mon cœur, mon sang et ma perception. Je vis tout ce qu’il avait vu toute ma vie lorsque je n’étais qu’à moitié éveillé, prenant mon rêve pour la réalité. Désormais je pouvais voir ce qu’il n’avait pas cessé de voir. Je compris pourquoi il était silencieux et en repos dans la connaissance profonde qui désormais s’étalait devant moi. Dans le passé, il m’avait pointé du doigt la vérité lorsque je l’avais demandé et maintenant je partageais la vérité de sa position et de son point de vue ; la seule chose que j’avais à faire désormais était de simplement ouvrir les yeux, voir, et regarder. Alors que je voyais et regardais, un frisson chaud et une bénédiction me   parcoururent – me confirmant que tout cela était vrai.